D’après un mél de Philippe Aigrain
Il s’agit d’une approche très bienvenue, dans la mesure où l’usage
systématique des brevets comme principal indicateur d’innovation induit des
biais très importants, y compris le dépot de brevets pour pilotage
d’indicateurs (notamment dans les organismes de recherches publics ou
semi-publics). Il est cependant dommage que dans son analyse, le CAS s’arrête
en chemin lorsqu’il s’agit de distinguer qualitativement les secteurs
d’innovation : la note distingue industrie manufacturière et services de
façon pertinente, mais n’aborde pas la multiplication des brevets dans les
secteurs informationnels (logiciels, génomique et génétique) et leurs effets
pervers spécifiques, tant sur le plan économique que sur celui de
l’innovation.
Introduction de la note
Les données de brevet sont considérées comme l’un des meilleurs indicateurs – voire le meilleur – de
performance en matière d’innovation technologique, à l’échelle d’une entreprise, d’un organisme de recherche
ou d’un territoire. Le succès du brevet, sous cet angle, a pour contrepartie de déboucher sur une confusion
possible entre l’objectif et l’instrument, en laissant croire que multiplier les brevets constituerait un gage de
réussite, en toutes circonstances, sur le plan de l’innovation. En d’autres termes, si le brevet mérite son statut
d’outil privilégié pour évaluer les capacités d’innovation, cela ne saurait conduire à adopter une vision
étroitement quantitative du dépôt de brevet. Pourtant, les discussions sur la nécessaire réforme du système
européen des brevets demeurent en général focalisées sur cette dimension quantitative et, de façon liée, sur la
question des coûts associés à l’obtention des brevets. Dans cette perspective, la présente note vise tout
d’abord à préciser la portée et les limites du brevet comme indicateur d’innovation, notamment en termes de
comparaison internationale. Elle conduit ensuite à mettre en lumière la question de la qualité des brevets, qui
demeure encore mal connue, tout du moins en France, bien qu’elle puisse être considérée désormais comme le
principal enjeu du débat sur la réforme du système européen des brevets, par contrecoup des tendances
contemporaines à l’inflation des dépôts.