US : L’internet sans fil municipal en perte de vitesse ?

un article d’Internet actu

L’internet sans fil municipal était supposé démocratiser l’accès à internet et transformer la relation des citoyens à la cité. En 2004, les maires de Philadelphie et San Francisco avaient levé le voile sur d’ambitieux plans de réseaux municipaux sans fil. A la suite de ces annonces, à travers l’Amérique, des centaines de villes se sont lancées dans cette course. Depuis, de nombreux projets municipaux ont été freinés du fait des coûts importants de mise en oeuvre, de la faiblesse de la couverture de ces réseaux et surtout de la faiblesse de la demande. La ville de Chicago vient même d’annoncer qu’elle abandonnait le projet qu’elle a longtemps murie.

Reprise d’un article publié par Internet actu
Dans : Wi-fi et sans fil, Territoires, Mobilité, Politiques publiques, gouvernance, Brèves - Par Hubert Guillaud le 5/09/2007

(magazine en ligne sous licence Creative Commons)

Le coeur du problème explique The Economist est que les réseaux sans fil Wi-Fi extérieurs n’apportent pas toujours une connexion suffisante à l’intérieur des immeubles : le signal reste souvent faible. Sans compter que beaucoup de projets ont sous-estimé le nombre de bornes nécessaires pour assurer une bonne couverture - qu’il a parfois fallu augmenter de 20 à 100 %. Pire, les réseaux terminés n’ont attiré que peu d’utilisateurs : A Taipei (Taïwan), l’endroit au monde où le réseau Wi-Fi municipal est le plus développé, on ne comptait que 30 000 utilisateurs en avril 2007, alors que le projet en attendait 250 000 pour la fin 2006. Le réseau de Tempe dans l’Arizona, qui est sensé être le plus important des Etats-Unis et qui espérait 32 000 souscripteurs, n’en recueillait que 600 en avril 2006 - un chiffre qui aurait peu évolué depuis.

Comme dans beaucoup de villes à travers l’Amérique, le projet de réseau sans fil sur San Francisco est en rade. Earthlink, l’un des opérateurs majeurs dans ce secteur, après avoir perdu des utilisateurs, supprime des emplois et est en pleine restructuration… Est-ce à croire que les réseaux municipaux Wi-Fi sont en pleine crise ?

Bien sûr, les raisons sont nombreuses explique Bryan Alexander pour SmartMobs, mais partout on constate une faible adoption par les utilisateurs combinée à une envolée des coûts pour le déploiement de ces nuages de connectivité urbaine. “Il n’y a pas de Business Model”, martèlent les nombreux opposants à ces projets. Les supporters des MuniFi (ces réseaux municipaux Wi-Fi) pointent souvent l’exemple réussi du réseau Wi-Fi de Mountain View offert par Google (mais qui ne compte quelques 15 000 utilisateurs uniques par mois). Si ce n’est que ce réseau gratuit est implanté à un endroit particulier de la Silicon Valley où les gens ne quittent pas leur maison sans leur portable et ont un besoin maladif de rester connecter, précise Om Malik.

“Les consommateurs sont un rapport assez faibles pour les réseaux Wi-Fi Municipaux”, explique l’analyste Craig Settles auteur d’un récent rapport sur les impacts économiques des réseaux municipaux sans fil (.pdf) : “ce sont des clients coûteux à obtenir et encore plus coûteux à conserver”. “Je ne pense pas pour autant que ce soit la fin”, précise encore ce dernier. “Il y a une valeur à disposer d’un réseau municipal - notamment comme banc d’essai pour les applications, services et infrastructures mobiles - mais nous devons penser le processus plus soigneusement.” Et de suggérer au réseau de San Francisco une meilleure intégration (en combinant la fibre et le sans fil) et l’abandon de l’idée de développer un réseau gratuit pour tous, au profit d’un projet plus commercial.

Toutes les nouvelles ne sont pas mauvaises, mais pour l’instant, force est de constater que les réseaux citoyens (comme le réseau Mesh initié par Meraki Networks sur San Francisco), malgré leur incomplétude, se portent mieux, ou a tout le moins bénéficient encore d’une dynamique positive. Les petites villes sont souvent plus accessibles que les grosses, sans compter celles où la topographie et la culture internet s’y prêtent, comme c’est le cas à Portland qui est souvent cité en exemple.

“Trop de municipalités continuent à se concentrer sur de grands et ambitieux projets de réseaux sans fil municipaux qui n’ont pas une vision clair de leur rentabilité”, explique Joe Panettieri pour MuniWireless. Face à cela, les projets municipaux les plus réussis sont ceux où un département de la ville (police, travaux public…) a déployé une application forte sur ce réseau (réseau de télésurveillance, système de compteurs de gaz, d’eau ou d’électricité automatiques, réseau de communications d’urgences…) qui permet d’avoir un retour sur investissement assez clair, comme à Corpus Christi (Texas), Buffalo (Minnesota), Phoenix (Arizona), Providence (Rhode Island) et bien d’autres villes qui ont assuré la prospérité de leur réseau haut débit en y développant des applications propres.

Quand une municipalité réussi le déploiement d’une application, il est bien plus facile de construire une offre d’accès limitée ou compréhensible pour le public.”

Les projets en cours ou à l’étude continuent donc à s’égrainer, comme le souligne ce point complet réalisé par DailyWireless. 455 villes et comtés américains ont déployé ou projettent de déployer un réseau sans fil Wi-Fi. Ils n’étaient que 122 il y a 2 ans, rappelle MuniWireless dans leur dernier recensement (.pdf) (à compléter avec leur étude sur les Business Models). Mais le taux de déploiement devrait considérablement ralentir prédisent les analystes d’In-Stat.

Posté le 8 septembre 2007

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