Synthèse du projet ANR Capacity

Capacity est un projet de recherche soutenu par l’ANR. Mené entre 2015 et 2018, le projet Capacity questionne le potentiel de la société numérique à distribuer plus égalitairement les capacités d’agir - ou “empowerment”.
Nous présentons ici la synthèse du projet.

Il a associé la Fing, l’Université Rennes 2 et IMT Atlantique, et est labellisé par les Pôles de Compétitivité Cap Digital et Images et Réseaux.

Le site de Capacity : http://reseau.fing.org/groups/profile/160547/capacity

Contact du coordinateur (Fing) : Jacques-François Marchandise - jfmarchandise@fing.org / Renaud Francou - rfrancou@fing.org

Résumé en français

Depuis que le numérique existe, la question des inégalités sociales qu’il peut renforcer ou réduire est le plus souvent posée sous l’angle du rattrapage du retard, du comblement de la fracture numérique. Beaucoup de préjugés sociaux entourent cette vision selon laquelle la majorité serait “dedans” et une minorité de retardataires, plus pauvres, plus vieux, moins éduqués, “dehors”.
Pourtant, des personnes sans domicile fixe, ou en situation de handicap, ou d’illettrisme, trouvent dans le numérique des appuis pour renforcer leur autonomie.

À l’inverse, des personnes aisées utilisent peu ou mal le numérique, ou sont en difficulté avec leurs documents, leurs usages des services numériques.
Entre 2015 et 2018, le projet de recherche Capacity a travaillé les conditions dans lesquelles le numérique peut se révéler capacitant - ou au contraire, facteur d’inégalité. Il a tenté de qualifier et de vérifier les bénéfices attendus de démarches qui visent délibérément à favoriser l’ouverture, la contribution, les communautés apprenantes.
Capacity a cherché à mettre en évidence des facteurs et degrés du pouvoir d’agir : qu’est-ce qui fait que le numérique nous renforce ou nous affaiblit, consolide nos liens sociaux ou non, nous donne un meilleur accès à la connaissance ou nous sature d’informations ? Quels dispositifs physiques et en ligne vont s’avérer propices à nos projets et à nos choix ?

Pour appréhender les réalités de l’ “empowerment” en régime numérique, Capacity s’est notamment appuyé sur :

  • 10 terrains donnant lieu à monographies : un lieu d’accueil de soirée pour personnes sans domicile, des centres sociaux et/ou espaces publics numériques (Saint-Etienne, Brest, Lorient, Paris), deux dispositifs “Grande École du numérique” (Rennes et Marseille), 2 politiques publiques d’e-inclusion (Brest et Saint-Etienne), une petite commune rurale du centre Bretagne et un panel de PME et entreprises du secteur numérique en Bretagne ;
  • Une enquête nationale menée par Marsouin (2000 personnes représentatives de la
    population française), intégrée dans le World Internet Project - WIP ;
    Un travail de modélisation, par la confrontation d’approches théoriques et par la prise en compte des contextes territoriaux et du travail de terrain.

Les travaux de Capacity ont mis en lumière que les configurations propices au pouvoir d’agir outillé par le numérique peuvent s’analyser sous trois angles : l’intention politique, le dispositif et les trajectoires individuelles et collectives des personnes.
L’articulation de ces trois niveaux d’analyse permet de repérer les configurations dans lesquelles le potentiel des cultures numériques est converti en pouvoir d’agir et celles dans lesquelles il demeure une promesse non tenue voire un multiplicateur d’inégalités générateur de souffrance (phénomènes de déclassement social, de subjectivation négative, de réification).
Ce cadre d’analyse ouvre des pistes neuves pour concevoir de nouvelles politiques
publiques (inclusion, innovation, aménagement du territoire...) et d’accompagnement des “praticiens” dans le sens du pouvoir d’agir.

Résumé en anglais

The tension between emancipation and alienation, between autonomous behaviour and passive consumption, has been both central and fertile in how the "digital society" has emerged and structured itself, and will likely remain so in the future.
There is no lack of work on bottom-up innovation, as well as on the contribution of
"consumers" to the design and the improvement of the devices and services that they use.
Several major industry players have proven themselves capable of harnessing that energy.
The Capacity project has focused on the multiple, and concrete ways in which empowerment "happens" or “fails to happen”. It has studied how capacities are being distributed to ordinary users, allowing them to become tinkerers, innovators, or micro-entrepreneurs. It aimed to understand the conditions on which the emergence and sustainability of bottom-up dynamics lay : peer learning and mediations, networks and communities, regional ecosystems, socio-technical infrastructures and configurations...
In the digital age context, empowerment may offer a new social ladder, disrupt powers, suggest new ways for emancipation and innovation. On the contrary, it may distribute capacities to those who already have the most important social capital, increase inequality, establish new forms of domination and passive behaviours.

Favorable conditions for appropriation and empowerment are still unclear. These conditions are key factors to consider when making public policy, planning innovation and solving collective issues generated by the "digital society".
Capacity has sought to highlight factors and degrees of empowerment : what makes digital technology strengthen or weaken us, strengthen our social ties or not, give us better access to knowledge or saturate us with information ? What physical and online devices will be appropriate for our projects and choices ?To understand the realities of empowerment in a digital environment, Capacity has relied in particular on :

  • 10 observation fields giving rise to monographs : an evening reception centre for homeless people, social centres and/or digital public spaces (Saint-Etienne, Brest, Lorient, Paris), two "Grande Ecole du numérique" appliance projects (Rennes and Marseille), 2 e-inclusion public policies (Brest and Saint-Etienne), a small rural municipality in central Brittany and a panel of SMEs and companies in the digital sector in Brittany ;
  • A national survey conducted by Marsouin (2000 people representing the French population), integrated into the World Internet Project - WIP ;
  • A modelling work, by comparing theoretical approaches and taking into account
    territorial contexts and field work.

Capacity’s work has highlighted that the suitable configurations to digital empowerment can be analysed from three angles : the political intention, the mechanism and the individual and collective trajectories of people.
The articulation of these three levels of analysis makes it possible to identify the configurations in which the potential of digital cultures is converted into empowerment and those in which it remains a broken promise or even a multiplier of inequalities that generate suffering (phenomena of social downgrading, negative subjectification, reification).
This analytical framework opens up new avenues for designing new public policies (inclusion, innovation, spatial planning, etc.) and supporting "practitioners" in terms of empowerment.

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Marsouin

URL: http://www.marsouin.org/
Via un article de Margot Beauchamps, publié le 4 mars 2019

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