Libération : "dans les rouages de wikipédia"

Ce matin, double page dans Libé sur Wikipédia, avec une série de petits
portraits pour montrer les rôles des uns et des autres dans le
fonctionnement de l’encyclopédie.

Note de la rédaction : Un article intéressant au moment ou nous initions le projet wiki-Brest et encourageons l’écritrure sur wikipédia au pays de brest

De courts extraits d’un dossier publié dans le journal Libération

Dans les rouages de Wikipedia

Par Florent LATRIVE et Laurent MAURIAC

Succès planétaire sur le web, l’encyclopédie ouverte, alimentée par les
contributions d’internautes, est un projet qui marche au consensus et
travaille à sa neutralité.

Extrait :

...
Inauguré en 2001 aux Etats-Unis, Wikipedia compte aujourd’hui 3 millions
d’articles dans plus de 200 langues ; près d’un million d’entrées pour
la version anglophone, plus de 240 000 en français et même 4 500 en
breton. Fin décembre, la revue Nature/ a même affirmé que « le site
Wikipedia est une source d’information aussi valable que la vénérable
encyclopédie Britannica », après avoir soumis différentes pages,
provenant des deux sources et traitant des mêmes sujets scientifiques, à
des experts sans leur préciser la provenance des documents. Toutes
langues confondues, Wikipedia fait partie des 25 sites mondiaux les plus
visités, selon le service spécialisé Alexa.

Malgré les embardées et les polémiques, cet immense laboratoire de
coopération sociale intrigue. « Comment un système où l’édition est
ouverte à tout le monde peut-il tenir ? » interroge le sociologue Julien
Levrel, qui consacre justement une thèse à cette question. Sa réponse
est presque décevante : « Des procédures et des règles, seuls moyens de
faire vivre un ensemble aussi hétérogène. »

Le fondateur

Jimmy Wales (Etats-Unis)

[Extrait :

A 39 ans, Jimmy Wales a amassé suffisamment d’argent comme trader pour ne
plus avoir besoin d’en gagner. Comme ceux qui écrivent pour
l’encyclopédie, il est bénévole, mais consacre au projet dont il est à
l’origine un peu plus de temps que la moyenne. Jimmy Wales est le
président de la fondation Wikimedia, la structure qui gère et finance ­
grâce à des dons ­ l’encyclopédie.

« La principale chose que je fais,
sans relâche, c’est parler avec les gens, les encourager à continuer de
travailler, essayer d’aider à résoudre les conflits », raconte-t-il. Il
s’implique notamment dans le comité d’arbitrage en langue anglaise, qui
tranche les différends sur les articles. « Les domaines dans lesquels
les conflits arrivent le plus souvent sont surprenants, dit-il. Il ne
s’agit pas de conflits droite-gauche, de nature politique ou religieuse,
car le processus d’édition ouvert marche bien pour ce genre de choses.
Il s’agit plutôt de pratiques éditoriales. »
...

Le correcteur

Denis Fernkes (Etats-Unis)

Quand il s’est retrouvé à la retraite, Denis Fernkes, ancien rédacteur
de manuels techniques, s’est découvert un nouveau passe-temps : corriger
les fautes d’orthographe des articles de Wikipedia. Un moyen pour lui de
« contribuer à améliorer l’encyclopédie » et de s’intéresser à toutes
sortes de sujets. Denis Fernkes reconnaît s’être trompé une fois, en
rectifiant une tournure typiquement anglaise qu’il avait cru déplacée.
...

Le modérateur

David Berardan (France)

Son premier article sur Wikipedia, David Bérardan, docteur en chimie des
matériaux de 27 ans, l’a consacré à l’une de ses marottes : la
thermoélectricité. Un an plus tard, il vient de se faire élire
administrateur : sa candidature a été mise aux voix sur l’un des forums
ad hoc du site. Pendant quinze jours, tout wikipédien a pu voter.
Résultat de la « délibération » ? 77 pour, 2 contre et un joli score de
97,5 %, assez courant dans une communauté où le « consensus » est l’une
des règles.
...

Le Wikipedia francophone compte une soixantaine d’administrateurs ­ tous
bénévoles ­ pour 240 000 articles. Chaque jour, ils doivent parer une
vingtaine d’actes de vandalisme, petits ou grands ­ souvent sur des
sujets religieux ou politiques. Mais le plus difficile à repérer, c’est
« le petit vandalisme factuel, comme une date changée dans une
biographie. »
...

Le médiateur

Alexis Dufrenoy (France)

C’était début 2005. Sur le site de Wikipedia France, un adepte de Raël
bouleverse certains articles, d’autres internautes protestent. Le
minimiracle Wikipedia, où les internautes peuvent cohabiter et bâtir des
articles « neutres » d’une qualité croissante, est en danger, mis à mal
par les dialogues de sourds entre laïcs et religieux, droite et gauche,
pro et antimédecines alternatives, etc. « Le nombre de conflits entre
utilisateurs devenait ingérable, il fallait l’endiguer »/ raconte Alexis
Dufrenoy, 32 ans, informaticien. Il se retrouve dans le premier groupe
des arbitres, un comité de sept personnes élues via l’Internet chargées
de jouer les Casques bleus, sur requête d’un wikipédien. ...

Le détracteur

Ellisllk (France)

Wikipedia le déçoit. Dès janvier 2003, cet enseignant de 32 ans, connu
sous le pseudo d’Ellisllk, intervient sur les articles consacrés aux
mathématiques, « mais aussi sur les sectes ». Et se heurte aux
difficultés de mise en oeuvre d’un principe fondateur de l’encyclopédie,
la « neutralité », qui pousse à la cohabitation des points de vue, même
les plus délirants.Pour cet adepte de l’épistémologie, amoureux de la
démarche scientifique, Wikipedia porte en germe le « relativisme », par
la recherche du « consensus social » plutôt que de la vérité.
...

Posté le 27 février 2006

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