Reprise d’une interview diffusée par Captain Doc, avril 2005 et publiée sur le site
Captain Doc : Quelle est l’origine de Télésavoirs ?
Gaétan Cambra : J’animais "télémuseum" en partenariat avec les Musées
nationaux. Il s’agissait de propager la connaissance dans le champ des
beaux-arts en région et vers l’étranger, dans le cadre de duplex en
vidéoconférence entre les musées nationaux, des lycées ou des centres
multimédias. Mais à l’époque (1991-92), on pouvait difficilement
capitaliser ces contenus et les diffuser en ligne. Dans le droit fil du
concept de TéléMuséum est née l’idée de la vulgarisation scientifique,
mais les financements ne pouvaient plus être les mêmes. Le financement
public de projets télécoms au service de la culture, cela n’existe
plus...
Captain Doc : Parlons du financement, justement : comment vous-en
sortez-vous ?
G. C. : Comme vous le savez, les subventions du ministère de la
Recherche ont dangereusement décliné, notamment celles qui concernaient
la diffusion de la culture scientifique. Le modèle économique de
TéléSavoirs repose donc aujourd’hui sur trois pistes principales.
- 1/le micropaiement en vidéo à la demande. C’est un flux financier très
faible (5%), mais en croissance, qui se développe par le bouche à
oreille et grâce au référencement sur les sites. Il sert surtout à
amorcer les deux autres.
- 2/les institutionnels reprennent la demande du public dans les Régions,
les "territoires numériques", les cyberbases, les Espaces Publics
Numériques, comme par exemple à "Pau Broadband Country", dans le cadre
de la volonté des élus de promouvoir la diffusion de contenus
éducatifs. La technologie retenue par TéléSavoirs permet d’encapsuler
des contenus sur des Intranets territoriaux. Nous avons aussi des
partenariats en Afrique, sur des grandes villes dotées d’accès au haut
et très haut débit par satellite, Wi-Fi ou Boucle Locale Radio.
- 3/les Régions à leur tour veulent produire du contenu, pas seulement
l’acheter, à la fois pour mettre en valeur les domaines de recherche
sur leur territoire et pour développer la participation démocratique à
la prise de décision. Dans ce cadre nous avons un écho favorable de
plusieurs Présidents de Région.
Captain Doc : Comment percevez-vous l’intérêt du public pour
l’information scientifique et technique ?
G. C. : Le public est de plus en plus friand d’information dans ce
domaine. Or, sur les grandes chaînes publiques, la diffusion de la
connaissance scientifique a considérablement décru ; elle a été
remplacée par ce que j’appellerai le "divertissement technologique".
Mais pour l’homme public "éclairé", rien. Sauf Arte et France 5,
certes, mais pas de chaîne TV scientifique à part entière. Or sur le
Net à l’heure actuelle il n’est pas très difficile de créer en TV IP
une chaîne de flux qui servirait d’appel à TéléSavoirs en ligne, en
partenariat avec un ou plusieurs opérateurs "triple play" (accès
Internet à haut débit, téléphonie et télévision) avec qui nous sommes
en négociation.
Captain Doc : Et du côté des industriels cette entreprise trouve-t-elle
un accueil favorable ?
G. C. : Oui car l’industrie et la recherche connaissent à l’heure
actuelle une grave crise de vocations. La question est donc : comment
attirer les chercheurs ? Comment susciter les vocations, dès le plus
jeune âge ? De plus, les centres de recherche et les entreprises doivent
"communiquer" sur leurs travaux, et les territoires sur leurs "pôles
d’excellence" scientifiques.
Captain Doc : Comment faites-vous pour faire participer le public aux
débats ?
G. C. : En filmant et diffusant des débats entre scientifiques et
citoyens, comme ceux du "Bar des Sciences de Paris".
Par ailleurs, notamment dans le cadre de 2005 l’année mondiale de la
physique, nous nous préparons à organiser des débats en
vidéoconférence, entre Paris, Sao Paulo au Brésil, Beyrouth, le
Cameroun ou encore Madagascar. Cela demande une technologie
sophistiquée, mais que nous maîtrisons et avons déjà mise en ouvre
entre Paris et Berlin par exemple. Ces opérations devraient être
financées par des opérateurs privés et/ou par les Ambassades de
France.
Propos recueillis par A. S.
© A. S., Captain Doc, avril 2005