Opinion : Quel avenir pour les EPN ?

Par le comité de pilotage des jeudis des EPN

Depuis quelques années, des collectivités locales et des associations ont impulsé l’idée de faire découvrir l’informatique, de fournir les premiers rudiments d’un apprentissage de l’internet, en mettant à disposition des citoyens, des espaces publics numériques (acception largement usitée), lieux se comptant désormais par milliers dans notre pays.

« Nouveau métier », l’animateur multimédia a été chargé d’animer cet espace ancré dans le local et de le faire vivre. L’Etat a eu un rôle de soutien effectif aux EPN par une aide massive de fonctionnement : plusieurs milliers de personnes ont été embauchés sous contrat Emploi-Jeune, garantissant ainsi l’activité de l’EPN pour 5 ans.

En 2000, a été créée une Mission Interministérielle pour l’Accès Public remplacée au terme de son mandat par la Délégation aux Usages de l’Internet assurant entre autres, une labellisation et une information sur les initiatives du secteur.

A l’occasion de la perte de soutien au fonctionnement de la part de l’Etat, des collectivités et associations se posent la question de l’avenir des EPN.

Pourtant, l’utilité de l’accès public à l’internet est aujourd’hui clairement reconnue. Les territoires ayant impulsé une politique dynamique en ce sens voient leur développement facilité sur le plan de l’aménagement du territoire, de l’économie et de l’emploi voire du tourisme.

Selon leurs vocations propres, les EPN participent également au lien social, à l’éducation, à la culture et à la citoyenneté. Cette multiplicité fait l’originalité des EPN à la française. Le réseau informel le plus important d’espaces publics multimédias demeure le monde des bibliothèques où l’internet dépasse bien heureusement un usage strictement documentaire.

Quel projet pour quel avenir ?

Un EPN ne peut être viable sur un territoire que s’il émane d’un projet patiemment mûri en prenant en compte non seulement le lieu physique où il est implanté, l’importance de la volonté et du suivi des élus, l’action des agents municipaux mais aussi l’implication des habitants.

Cette démarche de réflexion en amont avec les futurs usagers est essentielle tout comme l’évaluation en cours et son évolution : réfléchir aux pratiques, aux usages inattendus, intégrer l’existant local pour positionner l’EPN comme lieu-ressource pour le territoire, un véritable espace ouvert sur et dans son environnement.

Illustration de la particularité des projets liés au milieu rural ou urbain, les nouvelles technologies relèvent de plus en plus de l’intercommunalité avec une diversité d’interventions élargie des animateurs multimédias auprès des populations non sectorisées, avec une attention toute particulière au développement économique et souvent une multiplication des lieux d’accueil complémentaires sur un même territoire.

Se projeter, c’est intégrer le futur dans des réflexions d’aujourd’hui.

La société évolue et les EPN sont marqués dans leurs activités par des préoccupations nouvelles des citoyens : une démarche attachée au concept européen de « formation tout au long de la vie », rôle pivot de relais péri-scolaire pour les enfants, lieu de rencontre et de médiation entre les personnes (intergénérationnel, interculturel, inter-quartiers). Les technologies devenant omniprésentes dans nos vies, les EPN peuvent être un lieu d’appropriation de la culture scientifiques et technique.

La démarche d’accompagnement vers les nouvelles technologies de publics éloignés de l’internet au sein des EPN reste une mission éducative et sociale de proximité essentielle. L’EPN est rarement un lieu de formation « stricto sensu » mais cette mission d’initiation est loin d’avoir atteint son but.

L’internet est une richesse gratuite, ouverte sur le monde, reposant sur le partage avant le service. Les EPN participent à une réflexion sur une vraie éducation citoyenne liée à l’informatique, à la mobilité des nouveaux outils mais aussi à une participation active des usagers à une expression en ligne. Apprendre à écrire sur internet, complémentaire au traditionnel « lire, écrire et compter », devient un enjeu prépondérant qui favorise une réelle démocratie participative dans les faits.

L’administration en ligne constitue un vivier intéressant d’activités pour les EPN sous réserve d’un réel accompagnement par la médiation humaine rendu possible par la formation des animateurs au droit et aux fonctionnement des établissements publics. C’est particulièrement vrai en milieu rural où les services publics peuvent être éloignés.

Enfin, le fonctionnement de l’EPN sur un modèle économique traditionnel d’un équilibre budgétaire établi uniquement sur ses propres activités est un leurre. L’EPN se situe dans le secteur non marchand, d’utilité sociale où la composante d’ « intégration » aux nouvelles technologies doit être considérée comme un service public à part entière, reposant sur un projet territorial.

C’est ainsi qu’il tire toute sa légitimité et qu’il se révèle utile à divers titres et concrètement pour les habitants.

Par le comité de pilotage des jeudis des EPN,

les auteurs par ordre alphabétique :

  • Nathalie Caclard
  • Loïc Dayot
  • Jean-Luc Raymond
Posté le 7 novembre 2004

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