enjeux académiques et scientifiques dans les pays en développement, ville de mexico, 9-10 octobre 2012

Appel à communication : Circulation internationale des connaissances

ORGANISÉ PAR l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement, Marseille, Mexico),
le CINVESTAV (Centro de Investigación y de Estudios Avanzados del Instituto Politécnico
Nacional / Departamento de Investigaciones Educativas, Mexico), UNAM-IISUE
(Universidad Nacional Autónoma de México / Instituto de Investigaciones Sobre la
Universidad y la Educación, Mexico), et l’Université de Panama, avec l’appui du
programme OBSMAC de IESALC/UNESCO.

  • Langues de travail : espagnol, français, anglais.

THÉMATIQUES

  • Perspective historique de la circulation internationale des savoirs disciplinaires,
    entre continents et pays
  • Les mobilités de personnels hautement qualifiés et la recomposition de la
    profession de scientifique
  • Les mobilités virtuelles et leurs incidences sur le travail de recherche scientifique :
    collaborations en ligne, partage des connaissances au sein des équipes et
    laboratoires virtuels

Présentation

Ce colloque international souhaite réunir, à Mexico, lieu emblématique des rencontres d’idées, situé
au croisement des Amériques, des chercheurs de toutes disciplines et les invite à présenter des
travaux sur la circulation internationale des savoirs entre les pays du Nord (industrialisés) et ceux
du Sud (en développement). Il s’agit notamment d’ouvrir un espace de dialogue pour rendre
compte de la façon dont les collaborations internationales se nouent entre des lieux éloignés par
leur position géographique, leur langue, leur histoire et leur situation dans l’univers de production
scientifique mondialisé. Nous nous intéresserons notamment à la manière dont les collaborations
s´inscrivent dans des traditions de coopération disciplinaire, consolidées depuis parfois plus d´un
siècle ou au contraire, en rupture avec celles-ci. De même, nous souhaitons mettre en évidence
comment les priorités de la coopération internationale en matière de recherche scientifique ont été
affectées depuis quinze à vingt ans par les procédures d´assurance-qualité et l’homogénéisation
croissante des critères d’évaluation retenus par les organismes académiques nationaux. Dans cette
perspective, nous analyserons les continuités et les ruptures qui, dans divers champs disciplinaires,
ont caractérisé les coopérations intellectuelles dont les modes d´exercice oscillent de la réciprocité
à la dépendance.

Nous nous intéresserons au fonctionnement des schémas de collaborations classique tout autant
qu’aux formes émergentes, et tout particulièrement à leurs incidences sur les modèles de
légitimation de la science, d’organisation de la reconnaissance des chercheurs et de reproduction
des élites intellectuelles. De même, nous cherchons à identifier les expériences d’échanges
mutuels de savoirs entre écoles de pensée du Nord vers le Sud tout autant que du Sud vers le
Nord. Nous nous pencherons sur les « effets secondaires » ou « pervers » des échanges
internationaux tels que la fuite des cerveaux et ses conséquences, l’acquisition réciproque de
savoirs et de savoir-faire ou l’érosion des capacités de développement scientifique indépendant.
Nous tenterons, non seulement de suivre les effets produits par les migrations provisoires et
définitives des ressources humaines hautement qualifiées mais aussi d’en mettre à jour la logique,
en termes de renforcement des disciplines et des domaines de recherche, de renouvellement des
thématiques, de consolidation comme de clivage des champs disciplinaires, de processus
d’internationalisation et d’hybridation des connaissances. Finalement, nous analyserons les
résultats de ces phénomènes, en les interprétant à partir d’approximations conceptuelles en
concurrence pour rendre compte, soit de l´obtention de gains partagés (scientifiques, politiques,
sociaux, symboliques…), soit de la reconfiguration des hiérarchies entre pays et équipes
scientifiques, sur la base d´inégalités moins visibles mais tout aussi criantes que celles de l´aprèsguerre
que traduit trop bien la métaphore « fuite des cerveaux ».

On ignore encore très largement les impacts de ces nouvelles mobilités, physiques ou virtuelles,
sur la constitution des champs disciplinaires, sur l’émergence de réseaux, sur la formation des
élites académiques et scientifiques mexicaines. Nous ne savons pas dans quelle mesure la
mondialisation de la science peut justifier la mise en oeuvre de réformes dans l’organisation de la
recherche même si les experts font trop souvent de « l’économie du savoir » le scénario de
référence. Nous ne savons pas plus comment s’effectue l’échange de connaissances et quels sont
les modèles de co-production et de diffusion des savoirs entre le Mexique et les divers pays
étrangers. Nous ignorons également le rôle des transferts de connaissances dans l’émergence de
nouveaux instruments, dans l’évolution de l’organisation du travail de même que son incidence sur
les priorités gouvernementales ou institutionnelles.

On ignore pour l’essentiel, l´impact des politiques d´accueil et d´attraction des migrants qualifiés
tant dans les pays récepteurs que dans ceux d´origine, les répercussions des mesures visant au
retour des scientifiques installés à l´étranger ou leur mise en liaison avec leurs collègues restés au
pays, autour de projets d´intérêt mutuel.

À ce propos, il conviendrait de réfléchir sur les contenus de programmes de constitution de réseaux
et de rapatriement ou migration inverse ; de s’´interroger sur des notions comme celle de
diasporas ; et de réfléchir sur la circulations des hommes et des idées dans un monde marqué par
un nomadisme croissant et par de fortes tentations de développement endogène, légitimées par les
résultats des politiques de renforcement des capacités scientifiques dans les pays à niveau de
développement intermédiaire.

Ainsi les questions suivantes pourront constituer l’épine dorsale de ce colloque :

  • quel est le poids
    de ces mobilités dans la configuration de « générations d’intellectuels » et celle de groupes de
    recherche ?
  • Quelles en sont les conséquences sur la construction du savoir scientifique et de la
    reproduction des élites ?
  • Quelle est la part de la composante internationale de la mobilité dans les
    trajectoires considérées généralement, par les pairs, comme prestigieuses ?
  • Quelle est la place des
    réseaux scientifiques, sociaux et économiques, dans le fonctionnement et la visibilité des équipes
    scientifiques les plus reconnues ?
  • Et finalement, dans quelles mesures les politiques publiques et
    institutionnelles ou les stratégies des chercheurs (collectives et individuelles) participent à la
    constitution d’un secteur – d’un marché – mondialisé de formation et de recherche ?

En particulier,
ces politiques s’appuient sur des indicateurs de productivité de la recherche (fondés sur des
données bibliométriques) qui tendent à normaliser la production de savoirs à une échelle de plus en
plus mondiale. L’emploi de ces indicateurs n’est pas neutre sur l’organisation de la science, sur les
disciplines, la concentration de la recherche…

  • Quels en sont les effets et y a t-il des alternatives
    possibles ?

Une des pistes pour aborder cette problématique est celle de la perspective historique. Pour mettre
en évidence ce processus, nous souhaitons engager des débats avec des spécialistes intéressés
par l’historicité des échanges de savoirs, des pratiques, des objets, depuis des approches situées.

L’idée est s’interroger sur les politiques, les conditions et les pratiques qui ont rendu possibles les
rencontres et les collaborations mais aussi les désaccords et les conflits. Une seconde perspective
est celle de la sociologie des élites et des idées qui permet d’analyser le fonctionnement de
groupes scientifiques « de référence », dans leur cadre national et international, avec des substrats
chronologiques distincts depuis la tradition des voyages d’étude à l’étranger jusqu’à la situation
actuelle caractérisée par de nouvelles divisions internationales du travail scientifique.
Penser la circulation des connaissances selon des approches historiographique et sociologique,
notamment à travers l’évaluation des politiques publiques, doit finalement nous permettre
d’analyser les contextes dans lesquels les pratiques de communication évoluent et de cerner
comment les sites de production de connaissances (laboratoire, terrain d’étude) se transforment.

Nous aborderons, sous cet angle, la manière dont l’introduction des outils virtuels affecte les formes
de production de connaissances. Nous chercherons à établir en quoi les nouvelles proximités entre
chercheurs appartenant à des institutions, des pays et des aires culturelles différents, transforment
(renouvellent) les disciplines scientifiques, altèrent les espaces de travail et les règles de
productiion scientifique. Et dans quelles mesures elles induisent une évolution des instruments
scientifiques et/ou de la manière de les utiliser. Ce colloque international a donc pour but d´ouvrir
un espace d´échange d’idées, d’expériences et de problématiques autour de :

  • L’évolution, le renouvellement des pratiques scientifiques de collaboration internationale et
    leurs incidences en termes de circulation des connaissances, notamment entre pays dits du
    Nord (hégémoniques) et du Sud (non hégémoniques) ;
  • Les mobilités académiques et scientifiques entre les mêmes pays, en s’attachant à analyser les
    programmes associés et leurs résultats en termes de transfert de connaissances ;
  • Le degré de territorialisation des réseaux de recherche et d’innovation en analysant le rôle des
    différents types de proximité (géographique versus non géographique) dans la formation de ces
    réseaux et en interrogeant la pertinence des politiques publiques visant à soutenir le
    développement de réseaux locaux ;
  • Les transformations de l’organisation du laboratoire, les modalités de financement et de gestion
    de la recherche, le positionnement géographique et fonctionnel des équipes dans le cadre de
    collectifs de recherche interinstitutionnels, internationaux, multi-localisés et/ou virtuels.
Posté le 14 novembre 2011 par Michel Briand

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