Le télétravail : L’avenir est-il au travail à distance ? (2011)

Article de fond ANIS
Rédaction : Justine Armstrong - pour ANIS - Juin 2011

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Les technologies numériques modèlent chaque jour davantage nos modes de vies. Le télétravail s’inscrit dans cette dynamique du changement.

En France, le nombre de télétravailleurs augmente lentement. En 2010, à peine 8,5 % de la population active est concernée. L’hexagone émet encore de nombreuses réticences à la généralisation du télétravail.

Ce mois-ci, ANIS vous propose de s’attarder sur le sujet, de comprendre les enjeux de cette nouvelle organisation du travail et les freins rencontrés à son évolution dans notre société.

Télétravail, késako ?

Les technologies numériques remettent en cause les schémas établis, instaurés par l’industrialisation à partir du XIXe siècle, de l’unité de temps et de lieu.

Le « télétravail » désigne de manière générale toutes les formes de travail à distance, c’est-à-dire les formes d’organisation et/ou de réalisation du travail rendues possibles hors de la classique unité de temps et de lieu, par les moyens de télécommunication et l’Internet dans le cadre d’une prestation de service ou d’une relation salariale.

Photo www.homeworking4me.co.uk

Il existe plusieurs profils de télétravailleurs : des travailleurs indépendants, des salariés (cadres en général),… dont l’organisation permet le travail à distance.

Le télétravail peut être continu ou partiel, le salarié partageant son temps entre son bureau et son domicile ou un télécentre.

La grande majorité des travailleurs pourrait adopter ce mode alternatif.
Aujourd’hui, on estime que 30% des métiers sont potentiellement télétravaillables, au moins en partie. Notamment, les métiers nécessitant simplement de posséder un ordinateur et un téléphone.

Qu’est-ce qu’un télécentre ?

Le télétravail n’est pas déterminé par le fait de travailler de chez soi, mais de travailler à distance.

Le télécentre peut se définir comme une ressource immobilière composée de bureaux équipés d’outils informatiques et mis à la disposition de télétravailleurs.

Il existe une grande variété de télécentres, tant du point de vue de la nature juridique de son exploitant (public ou privé), du besoin auquel il répond (solution de non transport dans les grandes métropoles, outil d’aménagement du territoire dans les zones rurales), que des services auxquels il est associé.

Les télécentres offrent aux travailleurs tous les avantages du télétravail et pallient à certains inconvénients du télétravail à domicile. Le télécentre permet en effet au télétravailleur salarié de travailler sur un poste de travail professionnel, d’éviter l’isolement, et de maintenir plus facilement une frontière entre vie personnelle et vie professionnelle.

La réglementation

En 2002, dans le cadre d’une initiative européenne, le Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie a établi un « Accord cadre européen sur le télétravail », qui liste les droits et les devoirs de l’employeur et du salarié dans le cadre du télétravail.
Il fait état des obligations de l’employeur et du salarié :

- L’employeur se doit d’informer le télétravailleur des conditions de son contrat et du travail à réaliser (lieu du travail, durée, rémunération) ; de fournir la possibilité au télétravailleur de rencontrer régulièrement ses collègues ; de couvrir les coûts directement causés par le travail ; de fournir un service approprié d’appui technique et d’équipement (sauf si le télétravailleur utilise ses propres outils).
- De son côté, le télétravailleur doit gérer l’organisation de son temps de travail et prendre soin des équipements qui lui sont confiés.

Aujourd’hui, le gouvernement s’interroge sur la possibilité laissée au salarié et à l’entreprise de recourir au télétravail plutôt qu’à un arrêt-maladie dans les cas où « un salarié est empêché de se rendre à son travail et non de l’exercer ». Le médecin pourrait ainsi délivrer au patient un arrêt de travail assorti d’une attestation médicale au télétravail.
Le télétravail pourrait également être un outil de transition vers un retour à la vie professionnelle en cas d’affection de longue durée, de mi-temps thérapeutique.

Les avantages et les inconvénients du télétravail

Le télétravail implique le développement de nouveaux rapports entre l’entreprise et ses salariés, comme la nécessité de devoir développer des relations de confiance.

Les avantages sont multiples, à la fois pour les télétravailleurs et pour la structure d’embauche.

Dans certains cas (et notamment pour les jeunes parents), le télétravail peut être synonyme de meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, ouvrant par exemple la possibilité de travailler tout en s’occupant de ses enfants.

Photo http://infosondages.com

Ce mode de travail peut également être une alternative à l’Open Space qui se généralise, et aux inconvénients qu’il engendre (manque de concentration dû aux nuisances sonores, stress,…).

D’un point de vue environnemental, il apparaît que le télétravail participe à la diminution globale des émissions de gaz à effet de serre par la réduction des déplacements qu’il implique.

Pour la structure, le télétravail entraîne généralement une augmentation de la rentabilité (estimée à environ 20%), notamment grâce à une augmentation de la motivation par la responsabilisation des salariés, une réduction des retards liés aux difficultés de déplacement (notamment dans les zones urbaines), un renforcement de la réactivité, une réduction des frais généraux et des dépenses,…

En contrepartie, le télétravail peut entraîner un sentiment d’isolement du travailleur (absence de dynamique de groupe, de l’aide des syndicats), surtout en cas de télétravail subit ou de surcharge de travail. Du côté des travailleurs, la plus grande appréhension est celle d’une perte de la frontière entre vie professionnelle et la vie personnelle.

Le télétravail induit aussi un éloignement du donneur d’ordre perçu comme un frein pour certaines entreprises.

La diffusion du télétravail dans le monde

Faute de définition normalisée au niveau international, la diffusion du télétravail reste difficile à mesurer par les organismes de statistiques.

Nous pouvons néanmoins noter de grandes tendances.
Dans son rapport « Le développement du télétravail dans la société numérique de demain », réalisé en novembre 2009, le Centre d’Analyse Stratégique (CAS) classifie les pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) en cinq groupes :

- Les pays du Nord de l’Europe (Pays-Bas, Finlande, Danemark…) et les États-Unis sont en tête avec plus de 20 % de télétravailleurs actuellement en activité et une importante faisabilité du télétravail.
- Les pays du centre de l’Europe et/ou anglo-saxons (à savoir la Suède, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Suisse) comptabilisent entre 15 % et 20 % de télétravailleurs. Dans ces pays, le télétravail est un levier puissant de modernisation du marché de l’emploi.
- Le troisième ensemble regroupe les pays pour lesquels le télétravail n’est plus l’objet d’importants débats, mais dont l’usage n’est pas encore très développé. Ces pays comptent pour la plupart entre 10 % et 15 % de télétravailleurs. Il s’agit de l’Estonie, de la Grèce, de l’Irlande, de l’Italie et dans une moindre mesure de l’Autriche et de la Belgique.
- Le quatrième groupe, auquel appartient la France, comprend les pays où le télétravail est peu développé (entre 5 % et 10 % de télétravailleurs) et qui ont encore un effort important de sensibilisation à fournir, auprès des employeurs comme des employés.
- Le cinquième groupe, enfin, rassemble les pays pour lesquels le télétravail est négligeable et ne fait pas l’objet d’actions de la part des pouvoirs publics.

Pourquoi un tel retard en France ?

Le retard de la France serait notamment lié à l’attachement des Français aux structures organisationnelles classiques. Les Français semblent craindre que cette nouvelle organisation du travail entraîne un débordement de la vie professionnelle sur leur vie familiale.

Du côté des entreprises, il existe également des réticences liées au supposé manque de contrôle sur leurs salariés.

La mauvaise connaissance des responsabilités, les ambiguïtés du cadre juridique, et le manque d’incitations fiscales de la part des pouvoirs publics sont également des freins au développement du télétravail.

Il semble toutefois que, malgré les réticences, de plus en plus d’entreprises et de salariés semblent commencer à percevoir les avantages qui pourraient découler de cette nouvelle organisation du travail…

Sources :

- http://fr.wikipedia.org/wiki/Télétravail

- www.zevillage.net

- www.telecentres.fr

- Rapport du Centre d’Analyse Stratégique (CAS), « Le développement du télétravail dans la société numérique de demain », novembre 2009, www.strategie.gouv.fr/content/rapport-le-developpement-du-teletravail-dans-la-societe-numerique-de-demain

Via un article de Justine Armstrong, publié le 28 juin 2011

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