Les technologies de l’information au service des populations les plus pauvres

Une étude publiée et conduite par Hystra et Ashoka, avec le soutien de l’AFD, Proparco, Ericsson, France Télécom-Orange, ICCO et TNO, apporte un nouvel éclairage sur les business models efficaces et durables ayant un impact socio-économique positif pour les plus pauvres.

280 initiatives étudiées en Asie, en Amérique latine et en Afrique

L’étude s’est attachée à tirer les enseignements des approches existantes, en analysant plus de 280 initiatives mises en place par divers acteurs (entreprises, organisations de la société civile, entrepreneurs sociaux...) en Asie, en Amérique latine et en Afrique.

Les projets étudiés recourent aux TIC pour offrir des services aux plus pauvres dans 4 domaines principaux : éducation, santé, agriculture et développement rural, et services financiers. Hystra, le cabinet de conseil spécialiste des stratégies hybrides (sociales et économiques) chargé de piloter l’étude, et son partenaire Ashoka, une association à but non lucratif qui a soutenu depuis 1981 plus de 3 000 entrepreneurs sociaux dans le monde, ont évalué les projets.

L’analyse s’est basée sur 3 critères :

  • la capacité de ces projets à résoudre les problèmes auxquels ils s’attaquent,
  • leur viabilité financière
  • leur capacité à passer à grande échelle, à être répliqué dans d’autres géographies en dépassant le stade de l’expérimentation.

Les quinze business models les plus novateurs, dont l’échelle et les résultats sur le terrain montrent que les TIC peuvent être un levier pour améliorer durablement le niveau de vie des populations les plus pauvres, ont fait l’objet d’études de cas approfondies dans le rapport pour étayer les principales conclusions.

Les principales conclusions

La pérennité économique des projets varie d’un secteur à l’autre, les domaines des services financiers et du développement rural affichant la plus grande solidité financière

  • Les projets les plus innovants offrant des « services financiers » sont les plus matures en termes de pérennité et de mécanisme de marché, et parviennent à servir chacun plus de dix millions de personnes qui n’avaient jusqu’alors pas accès aux services bancaires
  • Dans le domaine de l’agriculture et du développement rural, les projets matures et viables utilisant les TIC sont nombreux, et peuvent avoir un réel impact socio-économique, augmentant les revenus des agriculteurs tout en permettant un gain d’efficacité de la chaîne d’approvisionnement agricole, bénéfique pour toutes les parties prenantes de l’écosystème agricole.
  • Le domaine de la santé est extrêmement dynamique parmi les secteurs où les TIC sont utilisées pour le développement, mais la plupart des projets sont subventionnés et leur viabilité financière à long terme n’est pas assurée, à l’exception de quelques niches telles que la téléconsultation ou l’authentification des médicaments par SMS.
  • Dans le domaine de l’éducation, les projets fondés sur les mécanismes du marché à destination des populations les plus défavorisées sont peu nombreux, alors qu’une demande dans ce domaine émerge.

De nouveaux business models faisant appel à des agents locaux ou au « crowdsourcing » répondent efficacement aux besoins des populations de la base de la pyramide

Faire appel à des « agents locaux », membres des communautés locales ayant des connaissances en informatique qui assurent l’interface entre les technologies et les utilisateurs finaux, facilite l’accès des populations peu formées à l’usage des TIC technologies aux services basés sur ces technologies. Ce business model permet en outre d’éviter le recours à des campagnes de communication massives et onéreuses pour faire connaître le service : la publicité est relayée par chacun des intermédiaires dans leur zone d’activité.

Le « crowdsourcing » s’appuie sur les technologies de l’information pour permettre au plus grand nombre - toute personne ayant accès à la technologie - de fournir un service à distance par téléphone ou Internet, offrant ainsi aux populations rurales même isolées la possibilité de contribuer au développement économique.

Une approche entrepreneuriale est primordiale pour lancer des services innovants tandis que la collaboration transversale entre acteurs et entre secteurs est déterminante pour mettre en place les écosystèmes locaux indispensables pour réussir les déploiements à grande échelle.

Les projets qui réussissent sont construits à partir de la capacité et de la volonté de payer de leurs clients, puis testés localement sur le terrain au cours de tâtonnements successifs. Ces projets se heurtent néanmoins à plusieurs difficultés. Il leur faut s’appuyer sur des ressources humaines alliant un savoir-faire technique et sectoriel à une connaissance des habitudes et de la demande au niveau le plus local. Ils doivent également trouver des investissements et des partenaires de long terme pour supporter la phase longue - et nécessaire - de tâtonnements initial.

La coopération transversale entre secteurs et entre acteurs (gouvernements, agences d’aide au développement, entrepreneurs sociaux, grandes entreprises, institutions financières, organisations de la société civile et organismes de recherche) est cruciale pour créer l’écosystème qui permettra de surmonter ces difficultés. Le niveau d’engagement de chaque type d’acteur sera déterminant pour que les services fondés sur les TIC améliorent les conditions de vie et les revenus des milliards de personnes vivant en deçà du seuil de pauvreté. L’étude propose en ce sens des recommandations aux différentes parties prenantes, les incitant à collaborer et à s’engager afin que la contribution des TIC au développement socio-économique durable des populations pauvres devienne une réalité.

publié le 28 septembre 2011

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