Et si on appliquait la liberté pédagogique à la classe numérique ?

Pourquoi demande-t-on aux enseignants de choisir leurs livres de cours et pas leur environnement numérique ?

Le principe de la liberté pédagogique, c’est que les enseignants peuvent choisir les moyens pédagogiques pour que les élèves maitrisent les objectifs définis par le programme, et les compétences visées.

Cela veut notamment dire que l’enseignant peut choisir :

  • les livres de ses cours, en concertation avec ses collègues (réunis en équipes pédagogiques) ;
  • les documents complémentaires sur lesquels il fera travailler ses élèves ;
  • les outils que les élèves utiliseront pour écrire ;

Mais par contre, l’institution cherche à imposer l’Environnement Numérique (de Travail) utilisé par tous, ce qui est en complète contradiction avec le principe de liberté pédagogique.

En fait, le premier problème est que personne ne se sent en responsabilité par rapport au numérique. Il y a bien les B2i et autres C2i qui ont été mis en place, mais ils sont définis de manière transversale, il y a donc un phénomène de fuite par rapport à ces problèmes là. Du coup la seule solution vu de l’administration semble être d’obliger les enseignants à investir l’ENT. Donc pas d’alternative possible dans ce mode là.

Second problème récurrent dans les problématiques du numérique : le corps professoral, qui demande encore à être convaincu, rassuré de ses expériences précédentes, et qui a pourtant un ordinateur chez lui.

Et pour finir, l’absence d’alternative identifiée. En effet, les outils du web2.0 sont souvent vus comme des machins, et ne sont pas pressentis comme des outils possibles à part entière, et qui demandent un investissement personnels, donc des enseignants convaincus.

Pour proposer des alternatives, permettant d’exercer une liberté pédagogique, il faut sans doute développer une offre externe, visible, ayant pignon sur rue, donc de type commercial. Difficile de dégager un budget pour cela, sachant que l’institution a beaucoup investi en interne. Quelles sont les alternatives ?

  • Le développement d’un marché au travers d’établissements qui ne relèvent pas directement de l’institution, ou qui comprendraient l’intérêt de passer par un prestataire externe pour l’ENT, au même titre que l’achat des PC passe par une telle externalisation. Les logiciels comme pronote sont basés sur ce créneau ;
  • Le développement d’offres couplées livre / environnement numérique. C’est le modèle économique du Livre Scolaire, qui en s’associant avec les enseignants collaboratifs pour créer ses livres en licence libre étend son offre à des environnements numériques par classe ;
  • Le développement d’une offre associative, comme le fait Sésamath. La nécessité de financement peut ici également passer par la formule d’offre couplée livre/site ;
  • Le développement d’une offre associative qui permettrait d’appréhender l’usage des outils du web et autres réseaux sociaux publics, ou d’environnements hébergés libres. La question dans ce cas est de comment développer et rendre cette offre accessible aux enseignants.

Plusieurs questions pourraient se poser :

  • Est ce qu’une concurrence aiderait à promouvoir le numérique, ou cela aurait-il pour effet de l’enterrer ?
  • Est ce qu’une telle solution aurait un effet positif ou non pour les élèves et leurs enseignants ?
  • Est ce que cela couterait plus ou moins cher à l’institution ?
  • Est ce qu’une concurrence entre associations d’enseignants et entreprises privées est possible à terme ?
  • Est-ce que le choix de l’environnement numérique doit se faire au niveau de la classe, de l’équipe pédagogique, de l’établissement ? Et si le choix était au niveau de chaque élève pour une personnalisation de son apprentissage (en anglais on parle de PLE pour Personal Learning Environment : environnement d’apprentissage personnel ) ?

Le problème est bien de dynamiser l’introduction du numérique dans la classe. Cela passe par une véritable intégration de la litéracie numérique dans les programmes disciplinaires, et par une proposition d’environnements pédagogiques d’apprentissage plutôt qu’une injonction d’Espace Numérique de Travail.

crédit photo : Virtual Classroom Project Meet-Up (April 19, 2008) par teachandlearn – licence CC-by-nc-sa-2.0


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URL: http://tipes.wordpress.com/
Via un article de Jean-Marie Gilliot, publié le 9 juin 2011

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