Un article de Florence Meichel repris du blog apprendre 2.0
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Dans son livre "le maitre ignorant" Jacques Ranciere montre avec brio comment le design mis en oeuvre au sein de l’éducation nationale francaise génère, entretient les inégalités d’apprentissages...Par définition, lorsqu’un enfant entre a l’école, il doit oublier qu’il appris, sans professeur de didactique ,les bases de sa langue maternelle. Il doit désormais se soumettre a l’idée qu’il est ignorant par définition et que seul le professeur sait comment il faut apprendre et ce qu’il faut apprendre...tout un programme auquel il est prie de se soumettre sans le questionner !....
A l’évidence, ce système nous conduit au pied du mur : les crises que nous traversons le révèlent de façon criante : les dérives et engrenage systémiques d’ordre financiers, écologiques, politiques ...etc...ne donnent pas lieu au sursaut d’esprit critique qui pourrait nous amener a identifier les problématiques et a les résoudre collectivement ! Nous faisons confiance aux institutions, comme nous l’avons si bien appris a l’école...l’institution est censée savoir ce qui est bon pour nous...Force est de constater que cette vision naïve est une impasse !
N’est-il pas grand temps de changer de cap et d’agir l’école sur le mode de l’émancipation pour chacun ?
Prenons un exemple autour de l’utilisation de twitter a des fins pédagogiques !
Selon moi, utiliser twitter en classe : c’est bien !...mais appréhender avec les élèves les designs centralises qui structurent cette application et leurs différents impacts : c’est mieux ! Je veux dire par la que s’arrêter a une approche superficielle de twitter ne sert pas l’émancipation des acteurs...Il serait beaucoup plus fertile d’aller au dela des usages en cherchant a identifier un certain nombre de dimensions, comme le souligne ici Olivier Auber :
"il s’agit simplement d’apprendre à distinguer dans une applications NBIC la nature de ce qui “lie” les usagers (ou les victimes), – entre eux d’une part, et avec l’application et l’organisation humaine qui l’a met en place, d’autre part -.
Trois bonnes questions peuvent être posées :
1) L’application est-elle intimement dépendante d’un centre physique particulier (un laboratoire, le siège d’une multinationale, un centre de commandement, etc.) ?
2) L’application nécessite-elle une connexion quasi-permanente « en temps réel » des parties concernées avec ce centre (via un serveur, un centre de distribution, un centre de calcul, etc.) ?
3) L’application met-elle en œuvre un « code » qui doit être partagé par toutes les parties impliquées ? Cela peut être un logiciel particulier, une (nano)machine, une fréquence radio, une adresse internet, une clé de cryptage, un protocole d’échange, un langage, un gène, un virus ou une molécule…
Dans les trois cas, les question subsidiaires sont : quelle est la rétroaction des usagers (…) sur le centre physique, ce commutateur ou ce code ? A qui appartiennent-ils ? Comment sont-ils gouvernés ?
Il va de soi que la plupart des applications que l’on pratique aujourd’hui, on est amené à répondre OUI aux trois questions. Dans le cas de l’application « Iphone » par exemple, les réponses sont : 1) Apple 2) Apple Store 3) l’objet Iphone lui-même. Faites vous-même l’exercice avec les application « Skype », « Vélib », etc. et tentez de répondre aussi aux questions subsidiaires…
Dans le cas des applications véritablement NBIC, les réponses sont plus complexes à formuler, notamment sur la question de gouvernance du « code », mais des analogies avec des applications connues de longue date peuvent aider. Par exemple le « tabac » peut être vu comme une application NBIC ancétrale. Les réponses seraient dans ce cas : 1) Industries du tabac 2) Circuit de distribution 3) Nicotine. Réponse à la question subsidiaire : la régulation de l’industrie du tabac a longtemps été confiée à des monopoles nationaux (SEITA), aujourd’hui elle s’opère essentiellement par voie fiscale (surtaxe), par la consommation ou la non-consommation, et la spéculation."
L’approche qui est décrite ici est tranversale et universelle...Elle est transposable a d’autres outils, d’autres recherches. En la mettant en oeuvre (par exemple autour de la pratique du générateur poiétique), d’une certaine manière on apprend a apprendre en développant un sens analytique et critique convocable dans d’autres contextes, d’où le caractère émancipateur de cette compétence !
Parler de démocratie a l’ère du numérique n’a de sens que si chacun de ses acteurs s’engage dans des processus d’émancipation...N’est-ce pas ce projet de société essentiel aujourd’hui que devrait porter l’école aujourd’hui ???
NB Billet écrit a la suite d’une discussion sur twitter avec @lelapin