Inal Djafar et le logiciel libre en Algérie

Interview reprise du blog de Philippe Scoffoni

Un article repris du blog de Philippe Scoffoni, "Logiciels Libres, Open Source, technologies ouvertes, Cloud Computing et tout le reste…".

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Maintenant que vous commencez à vous habituer au nouveaulook printanier de ce site, je vous propose de rencontrer son auteur : Inal Djafar.

Inal est un jeune homme qui vit de l’autre coté de la Méditerranée : en Algérie et plus précisément du coté d’Oran « la radieuse ». Il est étudiant en Informatique ce qui ne vous étonnera pas. Il est également l’auteur du site INALGNU que vous avez sûrement déjà lu si vous êtes un habitué de la webosphère du logiciel libre.

Maintenant, place aux questions.

Philippe : Inal peux-tu nous expliquer comment tu as découvert le logiciel libre ?

Inal : Chez moi l’informatique est une histoire de famille, mon père a fait mathématique & télécommunication, mon grand frère informatique, on peut dire qu’être Geek c’est de famille, depuis mon jeune âge j’ai eu droit à l’informatique à la maison, pendant un diner, une discussion avec mon grand frère ou dans le bureau de mon père, sur un vieux PC une distribution GNU/Linux installée.

Le logiciel libre ! j’ai découvert ça assez jeune, avec mon grand frère qui m’a transmis cet amour du »free software » et de l’esprit libre. J’ai encore plein de souvenirs de lui me parlant de ce qu’est un Hacker, m’expliquant le pourquoi du comment d’un logiciel libre, et même si je n’assimilais pas tout ce qu’il me racontait, vu que parfois on a besoin de connaissance bien profonde dans le domaine pour comprendre certaines choses, une fois que je me suis spécialisé dans l’informatique, j’ai commencé à y voir plus claire , et aimer de plus en plus ce mouvement.

Bon après, www.gnu.org et RMS restent la première vraie référence pour moi :-) , et puis je continue de découvrir et d’apprendre pleins de choses tout les jours à travers mes lectures quotidiennes et mes découvertes sur le web.

Philippe : On parle parfois des pays d’Afrique comme l’eldorado des logiciels libres, quelle est la situation en Algérie ?

Inal : Critique ! Une réponse qui résumerai en un mot la situation. En Algérie, les droits et licences informatiques n’ont aucun sens pour les utilisateurs, les copies de Micro$oft Windows sont vendues à 100Da<=>1€ »une promotion qui dure depuis toujours on va dire ! », aucune loi (jusqu’au jour d’aujourd’hui, à ma connaissance) ne contrôle la copie illégale des logiciels privateurs. Adobe Photoshop lui aussi coute 1euro, tout comme les autres logiciels, ça c’est pour vous donner une idée sur les prix. Ah, maintenant du côté des utilisateurs, l’utilisateur algérien s’en fou ! Tant que ça marche ! Que ce soit libre ou privateur, pour lui l’important c’est que son ordinateur fonctionne pour aller sur internet, gérer ses documents, écouter sa musique ou autre. Ce constat je l’ai fait avec les étudiants de mon université, mes profs, et les gens qui m’entourent.

Cela dit y a une minorité d’utilisateurs qui commencent à s’intéresser à »Ubuntu » particulièrement, pour la simple raison qu’il n’y ai pas de virus sous l’appelée à tort »Linux » et là moi je dis »Bonjour le mouvement libre ! ». On s’oriente vers une distribution GNU/Linux que parce qu’on leur dit : »il n’y a pas de virus vous êtes tranquille ou parce qu’il y a de jolis effets de bureau ». Sans chercher à comprendre ou plutôt sans leurs expliquer pourquoi un logiciel libre, c’est quoi une distribution GNU/Linux, et pourquoi le logiciel privateur c’est mal.

Personnellement je pense qu’il y a beaucoup de travail à faire dans ce pays. Le gouvernement de un, devrait prendre des mesures pour contrôler la copie, vente illégale de logiciel privateur, et de la protection des droits de l’auteur. Et de deux, sensibilisation des utilisateurs avec plus d’associations pour faire connaître et défendre le logiciel libre ici en Algérie, plus de groupes d’utilisateurs GNU/Linux. En attendant que notre gouvernement fasse le premier pas ! On ne peut pas défendre le logiciel libre dans un milieu comme celui-ci.

D’un autre côté, je pense qu’il y a pas de mauvaise chose dans ce pays, heureusement d’ailleurs. Il y a une communauté algérienne d’Ubuntu (pas encore approuvée) qui est entrain de se créer, des clubs, des blogueurs et gens qui sur le web font de leur mieux pour faire connaître le logiciel libre ! On a eu droit à une première Install Party GNU/Linux l’an passé à Alger(la capitale). Une deuxième Install Party à la sortie d’Ubuntu 10.04, prévue pour le mois de mai dans le même ville, organisé par le club »OpenMinds » que je salue au passage. Une distribution »GNU/Linux » algérienne nommée Bee Linux, basée sur Fedora mais que je n’approuve pas vraiment vu qu’elle inclue beaucoup de logiciels privateurs (skype et compagnie). Tout ça pour dire que ça bouge un peu, même si parfois pas dans le vrai sens du logiciel libre ! À la Ubuntu quoi.

Philippe : Quels sont les projets auxquels tu as participé ?

Inal : Franchement pas beaucoup, chose que je regrette, un logiciel libre n’a aucune valeur ici, même si je tiens à mettre tous mes logiciels sous licence GPL, un informaticien »bien gentil » viendra pour utiliser mon code source le compiler, le rendre privateur, et le vendre et/ou distribuer. Aucune loi ne me protège ! Vous voyez.

Avec mon grand frère, on essaye de faire bouger un peu les choses à Oran(ma ville natale) deuxième grande ville en Algérie, nous avons créé le Oran GNU Linux User Groupe (oglug) qui a pour but de défendre et faire connaître le logiciel libre à Oran. D’ailleurs, on est en train de préparer une Install Party GNU/Linux prochainement. Ça sera une première à Oran. Sinon on essaye aussi de lancer un projet pour une distribution algérienne totalement libre, qui sera approuvée par la FSF, basée sur Fedora (on y travaille).

Philippe : Fedora pourquoi l’as-tu choisi ? Qu’est-ce qui fait que c’est celle qui te va ?

Inal : #En python, ça donne !

import os
Class Fedora(RedHat) :

Pour les moins geek, je reviens sur l’histoire de famille, vu que j’ai découvert le logiciel libre avec mon frère, la première distribution qu’était installée sur l’un de nos PCs, une Mandrake à l’époque (Mandriva d’aujourd’hui). Par la suite, il a installé une RedHat. Et on peut dire que j’ai très vite accroché. Après je pense que tout le monde connait l’histoire de RedHat qui devient Fedora pour le grand public en 2003.

A la question : Ce qui me plaît dans cette distribution ? On l’appelle la distribution des développeurs et ce n’est pas tout à fait faux. Tout les outils de développement qu’elle m’offre, sa stabilité, sa communauté, et puis je me suis habitué aux RPMs, et à Yum on va dire ;-) . Je tiens à rappeler que sur mon serveur(à la maison), j’utilise aussi une BLAG, une distribution 100% libre basée sur Fedora(recommandée par la FSF), mais qui présente quand même quelques manques de gestion de matériel, faut l’avouer, et on ne peut pas vraiment dire que sa communauté est très active.

Philippe : Après tes études, tu as une idée de ce que tu voudrais faire ?

Inal : Travailler chez Micro$oft devenir son PDG, et libérer le monde… !

Non plus sérieusement pour le moment je fais des études en réseau, un domaine qui me passionne fortement, après pour ce qui va suivre franchement je me vois mal dans un laboratoire de recherche, donc, c’est clair pour moi que je m’orienterai vers une carrière professionnelle dans le domaine du réseau, je n’ai pas encore choisi une spécialité bien précise, mais je me vois bien dans la sécurité. Et pour le fun, je continuerai à travailler dans le développement web & design, que je considère d’ailleurs comme mon passe-temps préféré :-) .

Philippe : Pourquoi avoir consacré autant de temps à mon site ? Une forme de contribution ?

Inal : Une contribution à un projet qui nous apporte tant d’informations sur les logiciels libres au quotidien et qui à mon humble avis mérite d’avoir une image à la hauteur de son contenu.

Encore une fois merci, Inal pour tout ce travail et à très bientôt sur ton site !

Posté le 25 avril 2010

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