Publiciser la science en libre accès sur Internet : un enjeu démocratique

Publiciser la science en libre accès sur Internet : un enjeu démocratique

La valeur d’une démocratie se juge à la transparence de ses informations et le citoyen éclairé est celui qui a accès au savoir. Fort de ces valeurs-là, le monde scientifique a toujours défendu le libre accès à la connaissance par le biais de ses publications.

Seulement, à partir des années 1980,
il y a eu une crise des périodiques et le prix des abonnements a augmenté de plus en plus. Dans le même temps, le secteur marchand de l’édition scientifique s’est énormément concentré puisque 60% des revues appartenaient en 2003 à trois grands groupes commerciaux.

C’est dans ce contexte qu’ont vu le jour une série d’expérimentations permettant de disposer gratuitement des résultats de la recherche sur Internet. En 2001, à Budapest, a été inauguré ce que l’on appelle aujourd’hui le mouvement scientifique de l’accès ouvert, puis il a été prolongé par diverses expériences qui ont permis de mettre quelques ressources éducatives en ligne gratuitement.

Ce mouvement s’est fédéré jusqu’à la déclaration de Cap Town en 2008. Internet a joué un rôle perturbateur sur le marché car de nombreux éditeurs ont vu d’un mauvais œil l’arrivée des archives ouvertes. Ils n’étaient pas prêts à céder leurs droits de propriété intellectuelle par crainte de perdre des lecteurs et donc des revenus financiers. Aujourd’hui, 2/3 des journaux et des revues scientifiques permettraient aux auteurs de faire des copies électroniques. Certains éditeurs ont décidé d’étendre cette autorisation à plus de six mois ou à un an après la publication « papier », d’autres restent résolument campés sur des positions défensives.

Quelques pays, comme le Brésil et l’Allemagne, ont rendu obligatoire en 2007 la possibilité de mettre les publications scientifiques sur Internet. En France, les pouvoirs publics ont mis en place une plate-forme ouverte grâce au serveur HAL, sur lequel les chercheurs déposent des documents scientifiques de toutes disciplines.

Autoriser l’accès juridique et opérationnel des publications au plus grand nombre sont des préalables de « l’open access » scientifique. Mais les usages de ces outils par les scientifiques sont aujourd’hui controversés.

La médiation entre la science et le public est empêchée en effet par le fait que les chercheurs sont contraints de publier dans des revues plus ou moins cotées sur le marché du savoir. Si bien que peu de scientifiques jouent le jeu, préférant donner la primeur à des revues qui leur permettent d’avoir une reconnaissance dans leur communauté. Si le phénomène est moins important pour les thèses électroniques, il n’empêche que la publicisation de la science sur Internet se juge à l’aune de ces pratiques dévoyées aux « biens communs ».

La propriété intellectuelle, dans ce domaine aussi, est une des dimensions de la propriété. Situé quelque part entre des tendances protectionnistes incarnées par le droit et des revendications libertaires en faveur du libre accès aux biens culturels et intellectuels, « l’open access » scientifique invite à repenser de nouvelles formes de régulation publique.

L’adresse originale de cet article est http://fsm-sciences.org/spip.php?article371

Posté le 13 février 2009 par Pablo Ortellado

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