. Stimuler la participation des jeunes à la vie démocratique au moyen des TI

Repris d’un article publié par le Cefrio dans son bulletin Sistech

Lire l’article sur le site du Cefrio

On observe une tendance peu réjouissante depuis quelques années dans plusieurs pays industrialisés comme le Canada, la France ou le Royaume-Uni : la décroissance de la participation électorale. Le taux de participation aux élections fédérales canadiennes, qui se situait en moyenne à 75 % de 1945 à 1988, tombe, depuis 1993, sous la barre des 70 %. Le plus bas niveau a été atteint en 2004, avec 61 %. Au Québec, le taux de participation est passé de 78 % en 1998 à 70 % aux élections de 2003, la plus basse participation depuis 1927. Le désintéressement des jeunes de la vie politique explique en grande partie cette situation. Aux élections générales canadiennes de 2000, à peine le quart (25 %) des Canadiens âgés de 18 à 24 ans ont voté. Puisque les jeunes sont les plus grands utilisateurs des technologies de l’information et les plus désengagés politiquement, les technologies peuvent-elles stimuler l’intérêt des jeunes à la vie démocratique ? C’est le pari qu’ont fait certaines instances politiques.

La voix des jeunes sur la toile

Puisque Internet s’avère un outil d’interaction, plusieurs sites Web qui permettent aux jeunes de s’exprimer ont été répertoriés. Le portail jeunesse de Service Canada offre aux 15-30 ans de participer à un groupe de consultation en ligne au moyen du forum Connexion jeunesse canadienne. Pour les inciter à participer à la consultation, quelques avantages leur sont signalés : la possibilité d’échanger avec des jeunes de partout au Canada, de se prononcer sur les services du gouvernement, d’acquérir de l’expérience, de gagner des prix de participation. Le rapport de chaque consultation est ensuite disponible en ligne. L’équivalent européen, le Portail européen de la jeunesse, offre davantage d’outils pour favoriser la participation des jeunes. En plus des sondages en ligne, de la possibilité de poser des questions sur l’Union européenne, de faire des témoignages, de donner son opinion, ceux-ci peuvent s’inscrire à divers forums que propose le portail et qui portent sur une variété de sujets, dont les suivants : plus d’emplois de meilleure qualité pour les jeunes, les jeunes et l’Europe, citoyenneté active. Pour chaque sujet, les participants peuvent télécharger un document explicatif.

Au Royaume-Uni, plus précisément au pays de Galles, une organisation offre, sur son site Funky Dragon, la possibilité aux jeunes âgés de 0 à 25 ans de s’exprimer sur différents sujets pour que leur opinion soit entendue par le Welsh Assembly Government et par le gouvernement national. Des forums non modérés sont proposés, présentés par région et abordent différents thèmes. Le maire de Londres a créé un site destiné aux jeunes. Ceux-ci y trouvent des formulaires en ligne leur permettant de faire des commentaires et des suggestions sur des sujets d’actualité, pour améliorer la ville ou concernant le site en général. Les propos recueillis servent à concevoir des stratégies qui visent les jeunes.

Les blogues, parce qu’ils permettent aux visiteurs de laisser leurs commentaires, peuvent être utilisés pour favoriser la participation des jeunes à la vie démocratique. Aux États-Unis, une organisation sans but lucratif et indépendante, 18 to 35, qui se consacre à l’engagement des jeunes adultes dans les processus politiques, a lancé un blogue. Divers sujets y sont abordés, dont l’éducation, la santé, la politique.

Des enseignements tirés d’une consultation électronique par téléphone cellulaire

Puisque le téléphone cellulaire a une grande portée chez les jeunes, le conseil d’une ville de 193 200 résidents au nord de l’Angleterre a mis en place des consultations électroniques par messagerie texte (SMS). Le projet « Youth Participation Project » ciblait les 11-24 ans. Pour favoriser leur participation à la vie démocratique, le Conseil offrait un prix incitatif de 10 euros pour chaque tranche de 50 consultations complétées.

Au début du projet, en 2004, 100 jeunes étaient inscrits. À différents moments, le conseil a envoyé une question aux jeunes par messagerie texte, mais le taux de réponse s’est avéré plutôt faible, 9 %, 8 %, 7 % et 12 % pour les quatre premières consultations. En raison du faible taux de réponse, le projet a été interrompu, mais l’expérience a permis de tirer des conclusions pour mieux réussir une telle consultation :

  • Interagir davantage avec les participants par différents moyens (site Web, message SMS, etc.) et plus rapidement, pour montrer que leur opinion a été prise en compte.
  • S’assurer que les employés municipaux et les politiciens s’engagent activement dans le projet.
  • Mieux promouvoir la tenue d’activités participatives auprès des groupes cibles. Plus il y a de participants, plus l’opinion des jeunes sera prise en compte.
  • Poser des questions sur une base régulière.
  • Choisir les bonnes questions, soit celles qui portent sur des sujets qui intéressent les jeunes et qui favoriseront la participation.

La consultation électronique pour sonder les jeunes a été perçue, par le conseil municipal, comme un processus plus rapide que la consultation sur papier et plus objectif que les groupes de discussions dans lesquels les jeunes sont souvent influencés par la dynamique du groupe.

Consultations en ligne : les facteurs de succès

Les conclusions de l’expérience de consultation par téléphone cellulaire vont dans la même direction que celles de Stephen Coleman de l’Université de Leeds pour la consultation en ligne. En effet, à son avis, pour qu’une consultation en ligne auprès des jeunes soit bénéfique et réussie, elle doit respecter certaines règles :

  • Le gouvernement doit soutenir la participation des jeunes en ligne (aide technique, réponse à certaines interrogations), sans toutefois exercer un contrôle ni intervenir dans l’échange. Les jeunes doivent se sentir libres de s’exprimer. C’est à eux de décider des limites de leurs discussions. Cela ne signifie pas qu’il ne doit pas y avoir de règles, mais celles-ci doivent être transparentes.
  • Les jeunes doivent constater les effets de leurs discussions, par exemple, le moment où leur opinion aura un impact dans le processus décisionnel.

Enfin, pour qu’un réel dialogue s’installe entre les jeunes et les élus, et pour que les jeunes sentent qu’ils ont leur place dans la vie démocratique, ils doivent également sentir que les politiciens les respectent et s’intéressent à eux.

Cet article est tiré de la dernière édition du bulletin e-Veille réalisé pour le ministère des Services gouvernementaux. Consultez l’article en version intégrale et les autres articles du bulletin pour en apprendre davantage sur différentes initiatives en gouvernement électronique à travers le monde.

Rédactrice : Sabrina Côté, analyste en statistique, Direction des enquêtes et de la veille stratégique, CEFRIO

Principales sources :

ARCHER, Keith. « Augmentation de l’inscription des jeunes électeurs : de meilleures pratiques pour toucher les jeunes électeurs », Perspectives électorales, vol. 5, no 2, juillet 2003, 47 p.

COLEMAN, Stephen. « Digital voices and analogue citizenship : Bridging the gap between young people and the democratic process », Public Policy Research, décembre 2006-février 2007, Institute of Communication Studies, University of Leeds, p. 257-261.

ÉLECTIONS CANADA, pages Web, « Taux de participation aux élections et aux référendums fédéraux 1867-2006 » et « Jeunes électeurs ».

GRIFFIN, David, Philippa TREVORROW, Edward HALPIN. « Using SMS texting to encourage democratic participation by youth citizens : a case study of a project in an English local authority », Electronic Journal of e-Government, 2006, vol. 4, no 2, 7 p.

HOWE, Paul. « La participation électorale et le manque de connaissance », Perspectives électorales, vol. 5, no 2, juillet 2003, 47 p.

KERSCHOT, Hugo, Jo STEYAERT et Roland VAN GOMPEL. Fed-eView Citizen : étude longitudinale d’Internet et de l’e-government en Belgique, la parole au citoyen, Belgique, 2006.

PAMMETT, Jon H., Lawrence LEDUC. « La problématique du déclin de la participation électorale chez les jeunes », Perspectives électorales, vol. 5, no 2, juillet 2003, 47 p.

YOUTHNET et BRITISH YOUTH COUNCIL. « Respect ? Campaign. The Voice Behind the Hood. Young people call for an end to negative representation », 2006, 52 p.

Posté le 29 avril 2007

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