Protection juridique des DRM ? L’exemple australien !!

Avis critique La Commission des Affaires Juridiques et Constitutionnelles du parlement australien sur la protection juridique des DRM

Obligée par l’AUSFTA, accord bilatéral avec les Etats-Unis, l’Australie a adopté une loi similaire au DMCA américain et à la directive EUCD dont le projet DADVSI est une transposition des plus rigoureuses, refusant nombre d’exceptions possibles.

Le rapport australien nous donne l’occasion de réfléchir avant de commettre une erreur.

Un texte repris de l’article publé par Musique-libre.org

Il formule 37 recommandations sur les exceptions souhaitables et légitimes à l’interdiction de contournement des DRM : accessibilité, conservation et accès aux oeuvres, usages pédagogiques, académiques & institutionnels, recherche informatique, interopérabilité, usages légitimes par son propriétaire d’une oeuvre dûment achetée, ainsi que les limitations régionales, les DRM-logiciels espions ou la motivation anti-concurrentielle de leur implantation.
Toutes exceptions oubliées, passées par pertes et profits par le ministère et les lobbies qui soutiennent son projet.

Les premières analyses de Kim Weatherall et Michael Geist, entre autres, font ressortir l’importance de ce texte : qu’il devient nécessaire de protéger le public, les utilisateurs et le marché des "protections techniques" ; qu’il faut retrouver un équilibre menacé par l’extrémisme des "frénétiques de l’appropriation" (sur ce terme, cf. Cause Commune, chap. 3 notamment) : "copyright law must be balanced" .

En somme, pour conclure avec ceci n’est pas un blog, il s’agit un peu de ce qu’explique l’initiative eucd.info au sujet du projet DADVSI, depuis maintenant 3 ans..."
Car depuis le temps que la directive doit être transposée, il n’a pas manqué d’avis, d’expertises, constamment, obstinément refusées par le ministre de la Culture. Le projet va dans un seul sens : Droit comme Arme de Destruction et Vassalisation au Service de l’Industrie. Et la protection juridique des DRM & l’assimilation de leur contournement à la contrefaçon, en sont le coeur malfaisant.

Citons la conclusion sans équivoque d’une note de l’ADBS, Association des professionnels de l’information et de la documentation [c’est nous qui soulignons] : "Ces systèmes, qui répondent surtout à des intérêts commerciaux, pourraient contribuer à ralentir le processus d’accès aux œuvres, en augmenter le coût de distribution.
Ils pourraient se substituer à la protection juridique traditionnelle.
Ils pourraient remettre en cause les exceptions reconnues jusqu’alors, renforcer la primauté technique sur le droit, amoindrir les marges de manœuvre prévues dans le cadre légal et faciliter l’appropriation des ressources intellectuelles, au risque d’engendre un éclatement de la communauté virtuelle."

Citons la table des matières du chapitre 2 d’une étude d’Isabelle Vaillant, juriste, du cabinet Rojinsky [c’est nous qui soulignons] : "La protection juridique des mesures techniques ne devrait pas figurer au sein du code de propriété intellectuelle.
2.1. Ni la Directive du 22 mai 2001, ni les Traités de l’OMPI de 1996, n’assimilent le contournement de mesures techniques de protection à de la contrefaçon, et n’imposent en aucune manière de procéder à une telle assimilation

  • 2.2. La protection des mesures techniques est d’une logique distincte de la protection accordée par le CPI aux auteurs et aux titulaires de droits voisins
  • 2.3. L’insertion de cette protection au sein du CPI est inopportune".
    Citons enfin : Les limites de la protection technique des données numériques.

L’état des lieux est accablant, inquiétant. L’exemple australien est un avertissement clair ; et je ne résiste pas à la tentation de paraphraser pour conclure la Lettre ouverte aux artistes de Christian Paul : "dans un débat public mal préparé, efforçons-nous d’éviter les batailles de retardement pour faire émerger des solutions durables."


Donnons pour rendre compte de l’étendue du problème (quand on pense que le projet DADVSI prévoit un malheureux collège de trois médiateurs !!), la liste des exceptions examinées en détail par le Comité du Parlement Australien : occupant les pp. 92 à 115 du document (pp. 116 à 160 du pdf).

Pour chacune, le Comité examine l’exception, puis selon le cadre juridique en vigueur, les usages non-contrevenants, l’usage légal selon la loi Copyright australienne de 1968, les classes d’oeuvres, programmes concernés, enfin l’impact négatif valablement démontré des DRM et de leur protection juridique : "Credibly demonstrated likely adverse impact".
La phrase : "the following(s) likely adverse impact(s) was identified in evidence to the inquiry" revient fort souvent au long du document...

Posté le 4 mars 2006

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