Communiqué EUCD : DADVSI 2.0 bêta : Orwell, les Rapetous et Maginot sont dans un bateau

Commentaires d’EUCD.INFO sur les projets d’amendements gouvernementaux du 7 février -

L’initiative EUCD.INFO
a pris connaissance des amendements de travail du
ministère de la Culture. [1]

Apparemment, le ministère n’a toujours pas compris la problématique que
poserait la mise en place d’une protection par le secret sur "les mesures
techniques réputées efficaces", en terme d’atteinte à la liberté
d’expression, au droit à la copie privée, au droit au respect de la vie
privée, à la sécurité informatique, à la libre concurrence, au logiciel libre
et à la souveraineté de l’État. [2]

Commentaires d’EUCD.INFO sur les projets d’amendements gouvernementaux - en

Le ministère semble aussi persister à vouloir créer une juridiction
d’exception (le « collège des médiateurs »). Rendre impossible l’exercice du
droit d’accès à un juge indépendant et impartial par tout un chacun semble
être l’obsession des lobbyistes et des fonctionnaires qui conseillent les
ministres de la Culture successifs, pour certains depuis des décennies.

De plus, on assisterait - ce qui serait peu surprenant vu la pression
apparemment exercée par Vivendi Universal jusqu’au plus haut-sommet de l’État
[3] - au retour de l’amendement « VU » [3]
qui a « mis le feu au Net » en décembre
dernier. [4]

Cet amendement rend pénalement répréhensible (jusqu’à 3 ans/300 000 euros
d’amende) le fait de concevoir et distribuer des logiciels « manifestement
destinés » à la mise à disposition d’oeuvres sans autorisation. Il vise soit
tous les logiciels permettant d’échanger des données numériques, soit tous
les logiciels permettant d’échanger des données numériques et n’intègrant pas
des DRM, soit aucun logiciel. Dans les deux premiers cas il porte clairement
atteinte au principe de neutralité de la technique, à la liberté de
communication et est inapplicable. Dans dernier cas, il est tout simplement
inutile.

Le ministre Donnedieu De Vabres n’aura tiré aucun enseignement des débats du
20/21/22 décembre dernier s’il revient avec de telles propositions. [5]
D’autant plus qu’il surenchérirait. Sous couvert de baisse de peines, il
aggraverait la répression.

L’un des amendements inclut explicitement le simple téléchargement dans le
dispositif de riposte graduée alors que le téléchargement simple est
actuellement parfaitement légal. [6] Cela signifie que le nouveau projet de
loi transformerait quelques millions d’e-lecteurs de plus que le précédent en
délinquants sans pour autant apporter une solution à la rémunération des
artistes et au financement de la diversité culturelle. Bien au contraire. La
prohibition du téléchargement couperait en effet définitivement les artistes
d’une source de revenus et signerait la mort de nombreux festivals et
évènements culturels.

Si le téléchargement devient illégal, la redevance copie privée s’écroulera
mécaniquement mais encore plus rapidement que si les DRM sont déployés,
puisque les CD vierges et les baladeurs MP3 sont massivement utilisés pour
stocker et écouter de la musique téléchargée sur Internet. Ni les artistes,
ni les communes et régions ne pourront toucher l’argent de la redevance copie
privée. Si toucher de l’argent d’une copie privée, cela s’appelle une
redevance, toucher de l’argent d’un acte illégal, cela s’appellerait du
recel.

Enfin, l’initiative EUCD.INFO relève une nouvelle fois que les amendements
ayant fuités ne permettent pas de savoir qui détectera et comment seront
détectés les téléchargements devenus subitement illégaux. Il est vrai qu’il
faut pour cela intercepter des communications privées, et donc l’intervention
d’un juge. Il faudrait aussi interdire le Wifi et la cryptologie. Mais
peut-être aura-t-on droit de nouveau à un amendement de dernière minute de 7
pages privatisant des missions régaliennes de l’État ? [7]

Tout comme la légalisation du contrôle de copie et les DRM obligatoires, la
riposte graduée contre les téléchargeurs, c’est bien Maginot ou Orwell, et en
tout cas un pic d’impopularité prévisible et durable pour les responsables.

L’initiative EUCD.INFO demande dès lors au Premier Ministre de reprendre
rapidement la main sur ce projet de loi. Il est de sa responsabilité de chef
du gouvernement que le Ministre de la Culture ne revienne pas avec un tel
texte dans « l’amphithéâtre de la démocratie ». [« Dans l’amphithéâtre de la démocratie », Villepin lâche son 49-3...
]]

À propos d’EUCD.INFO

EUCD.info http://eucd.info est une initiative créée par la FSF France
(chapitre français de la Free Software Foundation) dont la mission est
d’informer sur les conséquences sociales et économiques de la directive
européenne du 22 mai 2001 relative au droit d’auteur et aux droits voisins
dans la société de l’information(surnommée EUCD), et de contribuer à
l’évolution de l’acquis communautaire relatif au droit d’auteur.

[2Dossier eucd.info sur le projet de loi DADVSI

[3Amendement VU : le retour de l’amendement
qui a mis le feu au Net

[4Pressions sur le gouvernement pour faire interdire le logiciel libre

[6Quelques jurisprudences
assimilant le téléchargement à de la copie privée

[7Chronologie du dossier e-milices Entrée du 22 décembre 2005

Posté le 12 février 2006

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