Creative Creative Commons, le meilleur des deux mondes ? un dossier sur le site Droit-TIC

Un article repris du blog S.I.lex Au croisement du droit et des sciences de l’information. Carnet de veille et de réflexion d’un bibliothécaire publié sous licence Creative commons by

En complément de l’article de jean Luc Raymond sur le sujet Dossier Creative Commons

Creative Commons, le meilleur des deux mondes ? Pierres-Yves Thoumsin

Le site Droit & Technologies a mis en ligne en début de semaine un consistant dossier sur les licences Creatives Commons, écrit par l’avocat belge Pierre-Yves Thoumsin, que je vous recommande vivement.

Cette étude présente à la fois la philosophie et les mécanismes des licences Creatives Commons, inventées à l’Université de Stanford sous l’impulsion du juriste Lawrence Lessig et qui sont devenues en quelques années l’un des piliers du développement de la culture libre.

L’analyse de Pierres-Yves Thoumsin montre bien que les licences Creative Commons ne constituent pas une rupture ou un abandon de la logique de la propriété intellectuelle, mais bien un aménagement qui permet aux auteurs de choisir quels droits ils souhaitent conserver sur leurs créations et quels droits ils préfèrent mettre entre parenthèses pour favoriser la circulation et la réutilisation des œuvres.

Celui qui a le pouvoir d’interdire a aussi le pouvoir d’autoriser, et les licences Creative Commons sont un moyen de formaliser et de rendre publique la permission, là où les règles classiques du droit d’auteur organisent surtout l’interdiction.

Il faut noter que les Creative Commons s’imposent de plus en plus comme un “standard de fait” pour la signalisation des droits sur Internet , car en plus d’être des contrats, ils remplissent aussi le rôle de métadonnées interprétables par les machines, telles les moteurs de recherche (voir la recherche avancée de Google, avec le champ “Droits d’utilisation”, qui fonctionne grâce aux CC ou le méta- moteurCC Search).

Les CC étaient déjà très présents sur de sites comme Flickr qui propose à ses utilisateurs une fonctionnalité pour accoler une licence aux photographies mises en ligne. C’est maintenant au tour du site de partage de vidéos Youtube d’annoncer qu’il adopte les licences Creative Commons. Et la communauté Wikipédia a voté le mois dernier pour décider de la compatibilité des licences Creatives Commons avec l’encyclopédie collaborative qui utilisait jusqu’à présent la licence libre GFDL.

Une autre utilisation des licences Creative Commons en lien avec Wikipédia mérite d’être signalée : dans le cadre d’un projet avec les musées hollandais, des volontaires prendront des photographies d’œuvres, pour les poster sur Wikipédia sous licence Creative Commons (avec l’accord des établissements à condition que la source soit citée). Une manière ingénieuse d’enrichir les articles en histoire de l’art et de contourner certaines difficultés dont j’ai déjà eu l’occasion de parler dans ce blog. D’autres actions de ce genre sont prévues à New York, Londres ou en Australie. A quand la France ? Et à quand des projets de ce type en bibliothèque !

J’ai quand même le plaisir de voir que l’utilisation des licences Creative Commons progresse aussi du côté des bibliothèques. c’est le cas par exemple sur le portail Lectura (le portail des bibliothèques des villes centres de rhône alpes) qui diffusent ainsi expositions virtuelles, dossiers pédagogiques, galeries d’images et bien plus encore.

A voir aussi le site “L’écho de la fabrique et la petite presse lyonnaise“, mis en ligne l’ENS-LSH de Lyon, qui utilise de son côté la licence CC/by-nc-sa.

Quant à la question de la validité des licences Creative Commons en droit français, je citeraiscet autre article du site Droit & Technologies : “Ces licences sont elles valables ou au contraire sont elles inopérantes face au droit de la propriété intellectuelle classique ? Aucune réponse n’a pour l’instant été donnée par la jurisprudence française, mais deux juridictions, l’une espagnole et l’une néerlandaise, ont reconnu leur efficacité, ce qui donne un assez bon indice de la validité de telles licences.” (Cahen Murielle)

Il ne faut pas dissimuler que certaines difficultés (ou du moins incertitudes) se posent encore. Je vous recommande de lire à ce sujet le chapitre que Michel Vivant et Jean-Michel Bruguière consacrent aux Creative Commons dans la nouvelle édition (2009) du précis Dalloz “Droit d’auteur” (p. 564 et suivantes). Après avoir mis en lumière les difficultés posées par les licences Creatives Commons, ils avancent cette conclusion : “il serait légitime de laisser l’auteur libre de ses choix (…) Sauf à ignorer le phénomène du libre et donc – il faut avoir conscience de cela – à laisser la France à l’écart d’un mouvement de première importance“.

Et je pense que l’utilisation de licences Creative Commons par les bibliothèques et autres institutions publiques ne peut que contribuer à assoir leur légitimité en France. Demandons-nous ce que les licences Creative Commons peuvent faire pour nous, mais aussi ce que nous pouvons faire pour elles. Et tout le monde sera gagnant !

(A lire aussi cette présentation qui porte sur une autre licence libre – Art libre – et qui aborde la question des licences libres sous l’angle de l’esthétique … fascinant !)

Si cet article vous a intéressé, voir aussi sur S.I.Lex :

Posté le 24 mai 2009

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