Guide "Education & EPN"

Compétences numériques et certification B2i

Entretien avec Bruno Devauchelle, Formateur-chercheur (CEPEC)

Les compétences numériques de base à l’ère de la Société de l’information

Quand on réfléchit à la question « A quoi faut-il former les jeunes dans ce monde ? », il y a la nécessité de réfléchir globalement à ce que j’appelle la « numéritie » *, on peut aussi parler de « culture numérique », qui se traduit par des compétences. Je les définis à plusieurs niveaux :

  • L’accès aux matériels et aux logiciels
  • La mise en fonctionnement et la connaissance des objets techniques
  • L’usage intégré à un contexte spécifique
  • La compréhension systémique et critique de ces technologies dans des contextes variés

Peut-on se contenter de former des gens à

des compétences de nature procédurales sans avoir le droit d’accéder à la compréhension des enjeux liés à cet usage ? Si on ne fait pas le lien en permanence entre ces différents niveaux, on est en train de rater complètement une véritable éducation à une culture numérique.

L’arrivée du B2i en 2000, a été une avancée très significative, car c’est la première fois que le Ministère de l’Education a introduit dans l’Ecole une prise en compte un peu plus globale où la maîtrise d’usage est la priorité dans un cadre citoyen et la technique est au service de la maîtrise d’usage.

* Numéritie : néologisme pour traduire le terme anglais de « digital literacy ». Les québécois ont introduit les termes de « littératie »

pour désigner la capacité à maîtriser l’écriture et la lecture et de « numératie » pour la capacité à maîtriser les nombres et les calculs.

Le B2i

est une certification des compétences, pas un programme de formation

Dans la tradition enseignante, on évalue ce qu’on enseigne, après l’avoir enseigné. Le B2i déstabilise beaucoup d’enseignants et beaucoup estiment ne pas avoir la compétence pour évaluer leurs élèves sur le B2i.

Globalement, la mise en place du B2i dans les établissements scolaires a été relativement ratée. Les enseignants ont une pratique personnelle très forte des TIC et sont très équipés, mais ils ont une double méfiance vis à vis de l’ordinateur. La première par rapport à l’objet lui-même et la seconde par rapport au trouble pédagogique qu’il introduit. Comme objet tiers dans la relation pédagogique, c’est un objet qui gène. Il y a bien un souci, seulement 14 % des élèves sortis de 3e en juin 2006 ont validé le B2i. Sachant qu’en juin 2008, tout élève qui voudra avoir le Brevet des Collèges devra avoir validé son B2i ... On a un écart énorme à rattraper.

Les leviers pour réussir la mise en place de la certification B2i

Il faut d’abord obtenir que dans l’espace d’activité, quelque soit le lieu, il y ait une banalisation de l’outil informatique. L’outil numérique n’est là que parmi d’autres, au sein d’activités multiples. Ce n’est pas un objet en soi, c’est un objet par rapport à une activité qui a une finalité : préparer un voyage, communiquer avec des membres de sa famille, ...

La certification n’est valable que lorsqu’elle est intégrée dans une pratique sociale. Je suis à la Poste, dans une librairie, ... j’ai besoin d’un renseignement complémentaire, il y a une borne, je sais me connecter ... ça c’est de la validation : « au moment où j’en ai besoin, je prends l’outil adapté et je l’utilise de façon pertinente ».

La plus-value apportée par la certification B2i

La certification des compétences favorise la

mobilité sociale, professionnelle, géographique. Quand un jeune se présente à un emploi, qu’on lui demande « Qu’est-ce que tu sais faire ? », à partir du moment où il a cette certification B2i, il peut valoriser ses compétences :

dire ce qu’il sait faire et non pas donner ses notes à l’examen. C’est tout l’intérêt de la validation : « je peux dire et je peux prouver ce que je sais faire ». Valider une compétence, c’est une exigence nettement supérieure à une simple note.

Un partenariat EPN / Etablissement scolaire autour de la préparation du B2i ?

L’idée d’associer pour la validation, le cadre d’un Espace Public Numérique, ou un stage en entreprise dans le cadre de l’alternance, me paraît d’autant plus pertinente qu’elle permet encore mieux de vérifier la transférabilité des compétences d’un contexte à l’autre.

Nous recommandons souvent aux enseignants, quand ils ne sont pas à l’aise de se faire accompagner par quelqu’un, de travailler en binôme, avec la-le documentaliste, avec quelqu’un de qualifié, ... C’est un bon moyen de mettre le pied à l’étrier, même si cela doit être temporaire. Il faut que les deux personnes soient vraiment dans une collaboration, et non pas dans une forme de concurrence. Le partenariat doit être bien défini au départ.

L’argument du « projet permettant de valider le B2i » n’est pas à négliger, en gardant toujours une réserve très forte sur la séparation des pouvoirs liée à la certification. Mais l’EPN peut se positionner en « facilitateur » pour la validation du B2i.

Les enseignants ont du mal à reconnaître d’autres statuts que le leur comme légitime dans l’enseignement. La question est d’asseoir la légitimité du partenaire non-enseignant pour intervenir auprès des jeunes. C’est un vrai frein à une collaboration.

Les intervenants doivent bien connaître les contraintes des enseignants, les programmes par exemple, et savoir trouver les mots pour feront écho selon la discipline enseignée.

Les bons relais pour monter un projet en partenariat avec un Collège

La nature du projet lui-même a de l’importance, certains thèmes impliquent obligatoirement de travailler avec des partenaires extérieurs : exemple l’orientation professionnelle des élèves.

Voici quelques médiateurs incontournables :

  • les documentalistes, souvent à l’interface culturelle et sociale, s’occupent aussi parfois des questions d’orientation.
  • les professeurs de technologie, gèrent notamment

le stage de 3e.

  • Et bien sûr les chefs d’établissement qui aideront à identifier les enseignants « porteurs de projets », ceux qui sont toujours partants pour participer à des projets.

L’adresse originale de cet article est http://www.creatif-public.net/article791.html

Posté le 22 août 2007 par Philippe Cazeneuve

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