Fêter le patrimoine, mais laisser disparaître le domaine public ?

Ce week-end, nous célébrons donc les Journées européennes du patrimoine, et vous serez des milliers et des milliers à aller visiter des monuments et des lieux de culture en France.

Il faudrait sans doute s’en réjouir, mais je n’y arrive pas. Vraiment pas…

Car voyez vous, ces journées sont celles du Patrimoine, mais pas celles du domaine public.

Les deux choses sont liées, mais elles demeurent profondément séparées en France. Le patrimoine national est fêté, protégé, valorisé et légitimé par le discours des pouvoirs publics. Le domaine public, quant à lui, est largement ignoré comme enjeu essentiel, et pire encore, dans sa version numérique, il subit une érosion croissante qui fait craindre pour sa disparition prochaine pure et simple.

Dans la plus grande indifférence…

Le domaine public est une notion liée à la propriété intellectuelle. Il correspond à cet état des oeuvres de l’esprit qui advient lorsque les droits patrimoniaux – de reproduction et de représentation – s’éteignent à l’expiration de la durée de protection (vie de l’auteur plus 70 ans, en principe). L’oeuvre devient alors librement utilisable par quiconque, y compris à des fins commerciales.

Source : Sketchtlex. CC-BY-NC-ND.

Il y a eu une Journée du domaine public, cette année, organisée le 26 janvier dernier par les associations Wikimedia France et Creative Commons France, à l’image du Public Domain Day, que le réseau européen Communia a mis en place le 1er janvier de chaque année pour célébrer l’entrée dans le domaine public de nouvelles oeuvres. C’était la première fois en France et j’avais eu l’honneur d’être invité pour participer à la conférence donnée en soirée. Je me souviens que j’avais néanmoins ressenti un pincement, car nous n’étions qu’une maigre poignée…

Au moment de la clôture de la conférence, j’avais dit que j’espérais qu’un jour les Journées du Patrimoine soient transformées en Journées du Patrimoine ET du Domaine public.

Quelques mois plus tard, voici donc ces Journées du patrimoine qui reviennent. Le gouvernement a changé ; la nouvelle ministre de la Culture fait des annonces à propos d’une loi consacrée au patrimoine, qui verrait le jour en 2013, comportant plusieurs mesures intéressantes et positives. Très bien.

Mais le domaine public reste toujours désespérément absent du radar, et pire encore, plusieurs évènements ont eu lieu cette année qui font entrevoir des atteintes gravissimes en préparation, avec peut-être un point de non-retour pour le domaine public numérisé.

J’ai trop longtemps repoussé la rédaction de ce billet, en raison des contraintes qui pesaient sur ma liberté d’expression, du fait du devoir de réserve auquel j’étais soumis. Aujourd’hui, je l’écris, en espérant qu’il permettra d’attirer l’attention et de provoquer une réaction avant qu’il ne soit définitivement trop tard.

Saccage juridique en règle du domaine public en France

Si le domaine public est en danger en France, c’est avant tout parce qu’il est menacé par les institutions culturelles qui devraient au contraire le protéger. Entendons-nous bien, je ne suis pas en train de dire que les bibliothèques, musées ou archives n’assurent pas leur rôle de conservation patrimoniale des oeuvres physiques qu’elles conservent. Mais à l’occasion de la numérisation de ces objets, elles sont une majorité écrasante à user de stratagèmes juridiques divers et variés pour porter atteinte à la liberté de réutilisation qui devrait être le pendant logique du domaine public.

Le problème est connu : allez sur les sites des musées, des bibliothèques et des archives. Vous y trouverez de très nombreuses oeuvres du domaine public numérisées et offertes à la consultation du public. Mais dans une écrasante majorité des cas, les images seront accompagnées d’une mention restrictive, qui restreindra les usages d’une manière ou d’une autre, quant un brutal “Copyright : tous droits réservés” ne sera pas purement et simplement appliqué !

J’étais vendredi dernier à l’INHA pour un colloque consacré aux “Pratiques des images numériques en sciences humaines“, pour intervenir sur les aspects juridiques liés à la question. La situation avait quelque chose de cocasse, car alors que j’expliquais que la numérisation ne permettait pas aux institutions culturelles de revendiquer un droit d’auteur sur des œuvres du domaine public numérisées, à défaut de créer une quelconque originalité, toutes les images de la bibliothèque numérique de l’INHA portent une agressive mention “© – Institut National de l’Histoire de l’Art”, quand bien même les originaux appartiennent au domaine public.

Du Toulouse-Lautrec, c’est bien dans le domaine public, non ?

Sauf que tout en bas, voici ce que l’on trouve !

Une telle revendication empêche toutes les formes de réutilisation, y compris les plus légitimes : elle bloque par exemple les usages pédagogiques et de recherche ; elle entrave les chercheurs qui voudraient utiliser ces images pour des publications scientifiques ; elle interdit aux simples internautes de les reprendre pour illustrer leurs blogs et leurs sites ; elle ne permet pas d’aller enrichir les articles de Wikipédia et d’autres sites collaboratifs. Elle bloque aussi bien entendu les réutilisations commerciales, qui devraient pourtant être autorisées, puisque les oeuvres appartiennent au domaine public.

Bien que la valeur juridique d’un tel copyright soit plus que douteuse (vous avez dit Copyfraud ?), cette pratique n’est pas isolée. Elle est au contraire massive dans la plupart des institutions culturelles. Dans les musées, au lieu de ce copyright brutal, on use parfois d’un autre stratagème, en reconnaissant un droit d’auteur aux photographes qui prennent des clichés de tableaux. Le musée se fait ensuite céder ce droit d’auteur par contrat, ce qui lui permet d’appliquer à la fois son copyright et celui du photographe. Allez sur les sites du Louvre, sur celui de la RMN et vous verrez que la pratique est généralisée.

Ça aussi, c’est dans le domaine public, non ?

Et non, surprise ! Du copyright partout, sur deux couches…

Au petit musée des horreurs juridiques, Arago, portail récemment ouvert dédié à l’histoire de la photographie atteint de véritables sommets. Les photos du domaine public y sont lourdement copyrightées, le droit à la copie privée des contenus supprimé et le clic droit est même désactivé ! Démonstration détaillée ici.

Cliché pris en 1855… mais (C) RMN-Grand palais (Musée Condé de Chantilly). Et pour sortir l’image du site, l’impression écran est ta seule amie !

D’autres institutions ont récemment développé une tactique plus subtile encore. Elles considèrent que la numérisation produit des données publiques (les oeuvres deviennent des séries de 0 et de 1, qui seraient constitutives d’informations publiques au sens de la loi du 17 juillet 1978). C’est le cas par exemple parfois à la RMN, à la BnF pour Gallica, aux Archives nationales pour Archim et dans bon nombre de services d’archives départementales. Elles peuvent alors conditionner certaines formes de réutilisation, notamment commerciales, à la passation d’une licence et au paiement d’une redevance. Recouvert par cette couche de droit des données publiques, le domaine public disparaît, dans sa signification originelle. Pourtant cette lecture de la loi de 1978 est juridiquement contestable, même si aucun tribunal n’a encore statué sur la question.

Les manifestations de ce “saccage juridique” peuvent prendre d’autres détours encore, comme lorsqu’au Musée d’Orsay, on interdit avec obstination aux visiteurs de prendre des photographies (même sans flash), y compris lorsque les oeuvres appartiennent au domaine public. Cette interdiction n’est cependant pas absolument générale, puisque si vous vous appelez Shakira par exemple, on vous laissera généreusement vous prendre en photo devant l’Olympia de Manet. Mais pour le citoyen lambda, prière de ranger le téléphone portable et de toucher seulement avec les yeux !

Le domaine public à Orsay. C’est pour Shakira only !

Nouvelles étapes de la marchandisation du domaine public par les institutions publiques

Les comportements signalés ci-dessus sont déjà critiquables, mais un nouveau stade s’apprête à être atteint par certaines institutions culturelles. Jusqu’à présent en effet, c’est la réutilisation des oeuvres du domaine public mises en ligne qui était entravée, mais les images pouvaient tout de même être consultées sur Internet.

Aujourd’hui, dans le but de marchandiser le domaine public, on en vient à envisager de ne plus mettre en ligne les images numérisées, pour mieux les vendre sous forme de bases de données, en partenariat avec des entreprises privées qui assureront la numérisation et se rémunèreront sur le produit des ventes.

Cette formule, qui constitue une forme d’atteinte absolue au domaine public, est envisagée en ce moment à la Bibliothèque nationale de France notamment, dans le cadre de plusieurs appels à partenariats, mettant à contribution les Investissements d’avenirs du Grand Emprunt national.

Les faits sont en réalité déjà connus, car ils ont été révélés par le site Actualitté cet été dans une série d’articles, et notamment celui-ci. On y apprend que la BnF serait sur le point de conclure des partenariats pour la numérisation de corpus importants de documents patrimoniaux : des livres anciens, des ouvrages de littérature, de la presse et des fonds sonores.

Dans le cas des livres anciens et de la presse, le modèle retenu est le suivant : un prestataire privé (Proquest par exemple pour les livres) numérisera les ouvrages, en recevant un soutien financier via le Grand Emprunt. Seule une partie minime du corpus pourra être accessible librement et gratuitement sur Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF (5% pour les livres). Le reste sera transformé en une base de données, non accessible en ligne, qui sera commercialisée via une filiale BnF (comme on l’apprend dans cet article paru au printemps dans le Bulletin des bibliothèques de France).

Cet embargo sur la mise en ligne sera maintenu durant une durée variable selon les corpus (7 ans pour les livres et la presse, 10 ans pour les fonds sonores) par le biais d’une exclusivité reconnue au partenaire commercial. A l’issue seulement de ce délai, les contenus numérisés pourront rejoindre Gallica en ligne.

Cette formule pourrait paraître constituer un compromis équilibré, permettant la numérisation de documents patrimoniaux, en répartissant les coûts importants entre le public et le privé. Mais ce n’est en réalité pas du tout le cas et ces montages violent des recommandations importantes faites au niveau international, si ce n’est la loi française !

Lisez la presse dans Gallica ? Sauf que bientôt il faudra payer ou se déplacer sur place… On n’arrête pas le progrès numérique !

Violation des recommandations européennes… et de la loi française ?

Un Comité des Sages, réuni par la Commission européenne, a en effet publié en janvier 2011 une série de recommandations concernant les partenariats public-privé en matière de numérisation du patrimoine. L’ironie veut d’ailleurs que les appels à partenariats de la BnF indiquent s’inspirer de ces recommandations, alors qu’en réalité, ils les foulent grossièrement au pied !

En effet, les sages européens ont recommandé que la durée des exclusivités accordées aux partenaires privés n’excède pas les 7 ans :

La période d’exclusivité ou d’usage préférentiel des œuvres numérisées dans le cadre d’un partenariat public-privé ne doit pas dépasser une durée de 7 ans. Une telle durée peut, en effet, être considérée comme pertinente pour, d’une part, générer suffisamment d’incitation à la numérisation pour le partenaire privé et, d’autre part, garantir un contrôle suffisant des institutions culturelles sur les œuvres numérisées.

Mais il s’agit en réalité d’une durée maximale de 7 ans pour une exclusivité commerciale seulement (le partenaire est le seul pendant 7 ans à pouvoir exploiter commercialement les contenus numérisés), mais pas du tout une exclusivité sur la mise en ligne elle-même !

Le texte du rapport indique en effet formellement plus haut que les oeuvres du domaine public numérisées doivent nécessairement être mises en ligne :

Afin de protéger les intérêts des institutions publiques qui concluraient un partenariat avec une entreprise privée, le Comité des sages considère que certaines conditions doivent a minima être respectées :

o Le contenu de l’accord entre une institution culturelle publique et son partenaire privé doit nécessairement être rendu public ;

Les œuvres du domaine public ayant fait l’objet d’une numérisation dans le cadre de ce partenariat doivent être accessibles gratuitement dans tous les

Etats membres de l’UE ;

o Le partenaire privé doit fournir à l’institution culturelle des fichiers numériques de qualité identique à ceux qu’il utilise pour son propre usage.

Les partenariats envisagés par la BnF “singent” ces recommandations, en faisant référence à une exclusivité de 7 ans, mais celle qu’ils prévoient n’est pas du tout celle qui était indiqué dans le rapport des Sages européens ! Ce rapport parlait d’exclusivité commerciale seulement, alors que la BnF va mettre en oeuvre une exclusivité sur la mise en ligne elle-même du domaine public…

Le domaine public, bientôt dans les fers numériques à la BnF ! (Par dorsetforyou.com, CC-BY-NC-SA)

On goutera pleinement l’ironie de cette affaire si l’on se souvient de l’énorme scandale qu’avait provoqué en 2009 la révélation d’un projet de numérisation à l’étude entre Google et la Bibliothèque nationale de France. A l’époque, ce qui était en discussion, c’était la numérisation des ouvrages par Google à ses frais, en contrepartie de l’imposition d’une exclusivité commerciale de 25 ans, identique à celle qu’il avait imposée à la Bibliothèque municipale de Lyon.

Mais les accords conclus par Google ne comportent aucune exclusivité concernant la mise en ligne elle-même. Le but de Google est bien de mettre en ligne les oeuvres du domaine public qu’il numérisent, sur Google Books et à présent sur Google Play, où l’on trouve d’ailleurs déjà des livres de la BM de Lyon, en téléchargement gratuit. Et même si Google impose des restrictions, les bibliothèques partenaires sont aussi autorisées à mettre en ligne les ouvrages sur leur propre site.

Un ouvrage issu des collections de la BM de Lyon, numérisé par Google et librement accessible en ligne sur Google Play.

La manière dont la BnF va “encapsuler” des oeuvres du domaine public numérisées dans des bases de données coupées du web pour mieux les vendre est donc à tout prendre bien pire en terme d’atteinte au domaine public que ce qui était envisagée avec Google. Et c’est là tout le paradoxe de ces appels à partenariats, car la mobilisation du Grand Emprunt devait normalement permettre de trouver une solution plus satisfaisante que celle proposée par Google (c’est ce que recommandait notamment le rapport Tessier). Or c’est exactement l’inverse qui s’est produit, car l’emprunt devant à terme être remboursé,

la BnF s’est tournée vers un modèle économique qui passe par la marchandisation de la matière brute du domaine public lui-même, et donc, par son anéantissement pur et simple !

Ce faisant, il n’est pas certain que l’établissement s’apprête à violer seulement les recommandations du Comité des Sages européens (sans valeur juridique en elles-mêmes), mais aussi peut-être directement la loi française, comme ce billet le suggère.

L’article 14 de la loi du 17 juillet 1978 relative à la réutilisation des informations publiques contient en effet ces dispositions restrictives en matière d’exclusivité accordée au privé :

La réutilisation d’informations publiques ne peut faire l’objet d’un droit d’exclusivité accordé à un tiers, sauf si un tel droit est nécessaire à l’exercice d’une mission de service public.

 Le bien-fondé de l’octroi d’un droit d’exclusivité fait l’objet d’un réexamen périodique au moins tous les trois ans.

J’aimerais beaucoup que l’on me démontre que l’exclusivité accordée ici aux partenaires privés type Proquest est “nécessaire” à l’exercice de la mission de service public de la BnF. Elle constitue plutôt une remise en cause de sa mission de diffusion du patrimoine culturel, sacrifiée sur l’autel du ROI !

Le pire, c’est que cet exemple semble à présent faire tâche d’huile et s’exporter, puisque que l’on a appris la semaine dernière que la Library of Congress a lancé elle aussi des appels à partenariats assez semblables à ceux de la BnF, si ce n’est que la période d’embargo sur la mise en ligne est limitée à 3 ans. Le réseau européen Communia a vivement réagi à cette annonce en pointant l’atteinte que pouvait constituer pour le domaine public une telle formule. Que dire alors des partenariats BnF ?

Une dégradation encore renforcée par la crise et les coupes budgétaires

Il est évident que la période qui s’ouvre va constituer un risque majeur pour l’intégrité du domaine public sous forme numérique. Les fortes restrictions budgétaires annoncées par le Ministère de la Culture et le climat de crise économique ambiant vont nécessairement peser sur les capacités des institutions culturelles à numériser leurs collections par leurs propres moyens.

Il y a donc de fortes chances que des partenariats public-privé, de plus en plus déséquilibrés en termes d’accès et de réutilisation des contenus, soient conclus, afin de permettre aux institutions de dégager des ressources propres. Ces considérations économiques vont être agitées comme des arguments-massue, qu’il sera très difficile de contrer.

Voilà bientôt ce qui restera du domaine public, en ces périodes de vaches maigres budgétaires. De la banquise en train de fondre… (par mountain wanderer. CC-BY-NC)

Pourtant, cette optique de marchandisation du domaine public relève d’une bien courte vue économique. Le fait de numériser et de rendre réutilisable le domaine public en ligne, y compris à des fins commerciales, peut constituer un effet de levier important sur de nombreux secteurs d’activité. Le domaine public numérisé peut être utilisé pour développer des contenus pédagogiques ; il offre de nouveaux matériaux pour la recherche et pour les publications scientifiques ; ces contenus forment aussi une “offre légale” gratuite, dont peuvent bénéficier les usagers (que l’on songe par exemple à l’importance des livres du domaine public gratuits, pour remplir nos tablettes et nos liseuses et développer de nouveaux usages de lecture) ; les oeuvres du domaine public peuvent également être rééditées ou adaptées par le secteur marchand, ou utilisées dans le cadre de services et d’applications.

Cette richesse “potentielle”, induite par la diffusion gratuite du domaine public, ne pourra se déployer que si l’on met pas d’entrave à la réutilisation des oeuvres, et surtout, si l’on continue à les diffuser en ligne, et non à les réduire en produits commerciaux coupés du web pour faire du “protectionnisme numérique”…

A défaut, on aboutira à une abolition pure et simple du domaine public sous forme numérique, alors que la numérisation aurait dû permettre au contraire d’en réaliser toutes les promesses !

Pour une loi sur le domaine public en France !

Que faire pour empêcher cette destruction programmée du domaine public ? Les pouvoirs publics réagiront-ils pour arrêter ces projets scandaleux, qui progressent dans la plus grande opacité et dont on peut craindre qu’ils ne soient bouclés avant qu’il ne soit trop tard ? Les nombreux députés et sénateurs, les intellectuels, qui étaient intervenus lors de l’affaire Google laisseront-ils faire bien pire aujourd’hui ?

A défaut, comme je l’ai déjà écrit, la seule voie qui resterait ouverte sera celle du hacking pur et simple.

Par Caroline Léna Becker. Domaine public.

Briser ces bases illégitimes, et sans doute illégales, pour libérer les oeuvres du domaine public en ligne ! Certains l’ont déjà fait, en s’attaquant à des musées, à des bases de données scientifiques ou à Google Books. Je vous conseille d’ailleurs à ce sujet de regarder la vidéo ci-dessous qui montre que certaines communautés s’interrogent sur la conduite à tenir face aux attaques répétées contre le domaine public… Faudra-t-il vraiment en arriver là ?

Mais il y aurait une autre manière de procéder, pour donner au domaine public consécration et protection par la loi.

Aurélie Filippetti annonce une grande loi sur le patrimoine pour 2013. Agissons, manifestons-nous et revendiquons à la place une loi sur le patrimoine et le domaine public ! Nous disposons pour ce faire des excellentes propositions formulées dans le cadre du Manifeste du Domaine Public de Communia, qui fixent un cap intéressant.

La loi française pourrait et devrait explicitement indiquer qu’il n’est pas possible de copyrighter des oeuvres du domaine public numérisées, lorsqu’on en fait des reproductions fidèles, ou de les recouvrir de couches de droit des données publiques. Le domaine public possède une valeur et une dignité supérieures à tous ces stratagèmes ! Un moyen plus simple que le recours en justice devrait aussi être ouvert aux citoyens pour faire valoir leurs droits à la réutilisation des oeuvres du domaine public. Pourquoi ne pas prévoir que la CADA par exemple puisse être saisie à cette fin ? La loi pourrait également consacrer explicitement la possibilité de verser par anticipation une oeuvre dans le domaine public (domaine public volontaire). Il faut également encadrer strictement les partenariats public-privé et fixer par la loi des limites fermes aux contreparties pouvant être accordées par les établissements publics à des sociétés privées.

Un tel chantier serait vaste, utile et enthousiasmant !

Que le domaine public devienne protégé, comme un bien commun de la connaissance, et non seulement comme un “patrimoine” que les établissements publics revendiquent comme des propriétaires ! (Bertrand Calenge a déjà écrit des choses intéressantes sur les rapports entre patrimoine, domaine public et biens communs).

Une loi sur le domaine public en 2013 et que l’année prochaine à la même date, nous célébrions pour la première fois ensemble, revêtus d’une égale dignité juridique, le Patrimoine ET le Domaine public !

PS : j’ai violé les interdictions à la réutilisation imposées par plusieurs institutions culturelles pour réaliser ce billet. Qu’elles viennent me chercher noise si elles le souhaitent ! Je les attends de pied ferme !

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L’adresse originale de cet article est http://www.revue-reseau-tic.net/Fet...

Via un article de calimaq, publié le 18 septembre 2012

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