Le site Owni a vérifié pendant tout le débat présidentiel télévisé l’exactitude des chiffres débités par les 2 candidats. Une expérience qui interroge les modes de traitement journalistique et devrait impacter les médias pour les années à venir.
92 chiffres pour l’un, 45 pour l’autre. Le débat de l’entre deux tour a surtout été une bataille de chiffres. Des chiffres souvent débattus et contestés entre eux par les candidats, qui ont fini certains échanges par des « On vérifiera ! ». Cette vérification, le site Owni l’a faite tout au long du débat, grâce à l’équipe du Véritomètre. 4 journalistes ont ainsi comparé la moindre statistique citée avec les sources officielles pour mesurer la véracité des propos des protagonistes.
Manque de volonté des médias ?
Ce travail de titan a été permis grâce à « une équipe sur-entrainée » comme l’explique Nicolas Patte, journaliste chez Owni. Pour la soirée du débat, 2 personnes étaient chargées de collecter les données citées par les candidats, 2 autres des vérifications. Ils s’appuyaient ensuite sur les informations « relevée depuis 3 mois », au cours de la campagne électorale. Il y avait au final peu de données nouvelles, les candidats « ayant une fâcheuse habitude à se répéter ».
Ce procédé, appelé factchecking, apparaît comme indispensable pour un débat de ce type afin de savoir à qui donner raison. Malheureusement le travail d’Owni a été peu reconnu car diffusé via les réseaux sociaux comme Twitter qui « n’est pas grand public » pour Nicolas Patte. Mis en place sur le plateau de télévision, la vérification des informations donnerait un tout autre relief au débat. Un dispositif « déjà imaginé par Owni » à un faible coût. Cependant, cela « ne semble pas être la volonté des médias » diffuseurs, plus habitués à un débat sans contradicteur d’après le journaliste d’Owni.
Une expérience qui amène de nouveaux revenus
Le problème vient souvent du coût d’un tel dispositif, pour des médias souvent en mauvaise santé financière. Owni a choisi de mettre en place le Véritomètre car se revendiquant comme « un laboratoire ». L’investissement a ainsi été de « 5 personnes à temps plein pendant trois mois ». Cela occasionne aussi un « retour sur investissement » avec l’arrivée de nouveaux partenariats, qui vont « générer de nouveaux revenus ».
L’expérience a en effet été en franc succès avec pour la seule soirée de mercredi une multiplication par 9 du trafic du site du Véritomètre et un passage de 2500 à 16 000 followers sur Twitter. Des preuves qu’il y a une vraie attente pour cette forme de data-journalisme (traitement de la donnée). L’outil va d’ailleurs poursuivre son action sous une autre forme, pour suivre les dires du futur Président. Il pourra ainsi continuer à « s’inscrire dans les médias et dans le public comme un baromètre ». De quoi imaginer un débat différent dans 5 ans.
Pour aller plus loin :
Les vérifications du débat
Le site du Véritomètre
Article d’Erwann Gaucher sur le factchecking à la télévision
